Martin_D a écrit:Le 2° fait référence aux logiciels destinés à contourner les MTP. Il est, selon moi, prématuré de penser que chaque logiciel coutourant une MTP tombera sous le coup de cet article, en effet seuls les lociciels destinés à contourner les MTP sont incriminés, or les programmes comme VLC ont pour but de visionner un DVD et pas de cracker la sécurité. Le contournement de la MTP n'est qu'un moyen et non une fin.
En conséquence il est évident que les logiciels tombent sous le coup de la loi s'ils ont pour but essentiel de détourner les mesures techniques...
Oui. Mais il faudrait être encore plus clair sur les termes et utiliser directement ceux du texte. On lit bien au L335-3-1. 1° du DADVSI les mots « altérer la protection ». Un logiciel de lecture n'altère pas la protection car il ne crée pas de version alterne de l'œuvre avec d'autres DRM, voire sans DRM. Il permet le visionnage de l'œuvre. Ce qui est délictueux c'est d'altérer la protection. Du coup DeCSS intégré dans un simple lecteur de DVD, sans permettre de diffuser l'œuvre, ne serait pas délictueux ? Par contre ce même DeCSS intégré dans un logiciel visant à ripper un DVD serait délictueux, car il altèrerait la protection. Mais je me trompe dans mon emploi du langage: ce n'est pas DeCSS qui serait ou non délictueux, mais le logiciel qui en fait usage. Mais peut-être y a-t-il un amendement à cet article dont je n'aurais pas connaissance qui reformulerait le terme « altérer » ?
Reste le problème de la diffusion de ce contournement, non autorisée par le DADVSI.
C'est là qu'il faut se tourner vers l'amendement n°195 qui place différentes exceptions à la recherche et à la diffusion de contournement des DRM, et notamment celui-ci : « l'interopérabilité d'un logiciel créé de façon indépendante ». Cette fois il me semble manifeste qu'un logiciel permettant la lecture, dans le cadre de l'interopérabilité d'un logiciel avec un format définit n'est pas délictueux.
Cela ne résoud cependant pas le problème de VLC. Il sera non autorisé à utiliser DeCSS car il permet une diffusion de l'œuvre sur un réseau. Diffusion qui altère la protection des DVD, ce qui du même coup entraîne une contrefaçon (d'après la reformulation de la contrefaçon). Le problème reste entier. Une solution pourrait peut-être consister à avoir VLC nu, c'est-à-dire sans contournements de DRM, mais pouvant utiliser - via un système de plugins par ex - des extentions qui pourraient être propriétaires et donc utiliser les DRM - à charge des personnes les utilisant de s'acquitter de la licence. Le logiciel pourrait alors rester libre et légal, mais cela risque de devoir demander un changement de licence, la GPL étant incompatible avec un tel comportement. Je ne sais même pas si la LGPL le permet.
Cela ne résoud pas non plus le pbm des limitations de lecture dans le temps ou dans le nombre d'une œuvre, ce qui s'apparente beaucoup plus à un droit de location. S'il est possible de contourner le DRM pour lire l'œuvre, alors on peut passer outre cette limitation. Est-ce altérer la protection ? Stricto senso: non. Ce n'est pas un usage autorisé pour autant... En même temps il suffit de voir l'insuccès des DVD auto destructibles pour douter du succès futur de tels comportements. À moins de le forcer. Mais bon : dérive totalitaire. Je ne suis pas sûr que cela passe.
Martin_D a écrit:beaucoup d'amendements en cours ont pour but d'améliorer la loi en élargissant les cercle des établissements recevant des autorisations de copie privée aux bibliothèques, centre de formation des fonctionnaires, recherche scientifique, associer l'auteur et l'interprète aux MTP, les webradios, l'interopérabilité...?
Je plussoie. Je viens de lire nombre d'amendements positifs dans les derniers amendements mis en ligne. Notamment les exceptions pour l'enseignement supérieur et la recherche [172], les bibliothèques dans le cadre normal de leurs activités. Mais aussi les amendements concernant la sécurité informatique - déclaration à la CNIL et au DCSSI des DRM afin de vérifier qu'il ne contiennent pas de spyware [190/191]. Ainsi que l'imposition de formats ouverts pour le dépot légal d'œuvres numériques ! L'argument des bibliothèques du dossier d'EUCD.info semble tomber à l'eau.
[hr]
Il reste cependant un point important: les logiciels permettant de diffuser, échanger ou partager des œuvres protégées. De ce que j'ai pu lire dans ce post, il serait possible d'attaquer des logiciels type Apache, FTP ou IIS. Or ces logiciels sont manifestements utilisés de manière parfaitement licites. Et imaginez donc un peu qu'un juge déclare illicite Apache par ex. Imaginez-vous l'impact économique rien que sur la France d'un tel jugement ? D'autant plus que cela ferait jurisprudence, et tous les logiciels alternes seraient eux aussi touchés, un par un. Le protocol lui-même ne gère pas les DRM, et encore moins les standards du W3C. Pourtant une page HTML peut contenir un livre !
Si on va dans cette voie là, il faut revenir à une époque antérieure à l'informatique. Ce n'est pas possible. Même déclarer un logiciel de FTP (eg: proftpd ou pureftpd) illégal c'est compromettre nombre de société d'hébergements.
Non ce qui est visé par l'amendement VU/SACEM/BSA ce sont les logiciels dits sociaux, les réseaux de partage [Aparté: pour eux il est inconcevable de partager la culture, car celle-ci - et cela inclut les idées - n'est pas l'apanage de tous, mais d'un groupe restreints de propriétaires qui se réservent tous droits dessus. Conception bien entendu radicalement incompatible avec l'idée d'une culture libre, partageable et commune]. Je pense que c'est cette notion de partage qui est indirectement attaquée par cet amendement. Si cela est réel, alors c'est très grave, car cela viserait directement toute économie alterne. Cependant si cela venait à être montré alors il serait « facile » d'attaquer les industries de la culture pour abus de position dominante visant à écraser toute concurrence émergente. Pour le moment elles se cachent derrière la concurrence déloyable en brandissant le garde fou du piratage. Pour le moment.
C'est là qu'interviennent les amendements [notamment les n°184 à 188] visant à une redevance sur l'abonnement Internet permettant de légaliser l'usage actuellement ilicite des réseaux de partage pour y partager des œuvres protégées. Les industries de la culture n'en veulent pas, et brandissent la concurrence déloyable face à leurs offres légales (actuelles et à venir). Ce à quoi l'amendement répond:
Les internautes qui ne téléchargent jamais de fichiers protégés, ou qui ne le font qu'en ayant recours aux services de plateformes payantes, et qui ne procèdent à aucun acte d'échange de fichiers, ne sont pas obligé de verser une rémunération forfaitaire ; N'étant pas imposée aux internautes, elle ne nuit pas au développement des offres commerciales nouvelles (iTunes, Yahoo, Playloud...)
D'autant plus qu'il ne s'agit pas de concurrence déloyale - car il ne s'agit pas d'une société particulière - mais plutôt de fournir un cadre légal en protégeant le consommateur tout en permettant une rétribution des ayants droits. Mais aussi et c'est le plus important: de respecter l'exception à la copie privée. Et c'est en ça qu'il ne s'agit pas de concurrence déloyale. Sans compter qu'elle déresponsabilise le logiciel, les éditeurs de logiciels et replace la responsabilité sur le seul acteur qui réalise un usage illicite: celui qui partage des œuvres protégées sans s'acquitter de la redevance. Soit sur l'utilisateur qui ne respecte pas le cadre légal.
Il y reste cependant une imprécision qu'il faudrait faire remonter rapidement à M. Suguenot, car il est écrit « et qui ne procèdent à aucun acte d'échange de fichiers ». Il n'est pas précisé le mot « protégés », alors qu'il l'est la ligne précédente. Il pourrait alors devenir illicite de partager des œuvres et logiciels libres, voire des œuvres du domaine public (!) sans s'acquiter de la dîme.
L'exposé sommaire finit sur ces mots, que je ne résiste pas à vous faire partager:
la légitimité à télécharger et à échanger de bonne foi des œuvres sur Internet ne pourra plus être contestée.
Du coup que devient l'amendement VU/SACEM/BSA dans ce cadre ? Pas grand chose à mon avis, car ils rendraient illégaux des logiciels dont l'utilisation est légale sous certaines conditions indépendantes au logiciel et à son éditeur. Hum. Question de bon sens: irrecevable.
Maintenant qu'en dit un juriste ? Ces interprétations sont-elles valables ? Elles sont de toutes façon sujettes à l'adoption des amendements sus-cités.
Note: afin de me présenter car cela se fait: je suis Julien PORTALIER, étudiant en Master de Philosophie. J'ai notamment travaillé l'an dernier sur un mémoire intitulé l'œuvre d'art à l'ère du numérique, dans lequel je réfléchissais au pbm de la transposition des œuvres d'art du monde analogique au monde numérique (de façon plus ou moins intéressante ou convaincante). Actuellement je travaille sur la culture et Internet pour un second mémoire. Bien entendu je suis amené à m'intéresser au futur de notre culture. J'ai donc attaqué il y a quelques heures la lecture des textes du projet de loi DADVSI et à ses amendements. Je tente donc d'afuter mes connaissances, tout en faisant avancer le débat en participant de manière active à ce forum. Même s'il est, et je le reconnais, un peu tard. Il n'est cependant jamais trop tard.