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Image Libérer les logiciels et tout autre contenu, comment adopter une Licence Libre ? (GNU GPL, Art Libre et Creative Commons).
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Jeu 06 Oct, 2005 12:18

@Druith
La GNU GPL comporte des stipulations problématiques au regard du droit français :

* non respect des mentions obligatoires prévues à l'article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) qui imposent notamment que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité ;
* présence de clauses d'exonération totale de responsabilité et de garantie à l'égard de tout licencié, non valides au regard de :
o l'article L.132-1 du Code de la consommation qui déclare nulles ces clauses lorsque le licencié est un utilisateur "consommateur" ou non professionnel,
o l'article 1386-15 du Code civil qui interdit ces clauses en cas de dommages causés par la défectuosité d'un logiciel à un consommateur ou non professionnel.

De plus, la GNU GPL, en faisant le choix de ne pas citer le droit auquel elle se réfère, introduit un élément important d'insécurité juridique. Le jugement d'un tribunal de Munich en 2004 a ainsi dû l'interpréter au regard de la loi allemande et n'a pas pu déterminer exactement si certaines clauses étaient valides ou non. CeCILL, par la mention du droit français et le respect des directives et règlements européens, est, de ce point de vue, juridiquement beaucoup plus robuste.

D'un point de vue technique, la définition de Module Interne dans CeCILL apporte une plus grande précision dans les limites de la contamination que dans le cas de la GNU GPL.
il y a quelques points qui se discutent, mais c'est insuffisant pour en conclure que la GPL n'a pas de valeur juridique, qu'elle n'est pas conforme, qu'elle est inapplicable etc. ça veut juste dire qu'en cas de littige, il faudra interpréter le contrat de licence GPL au regard de l'ensemble du droit français applicable.

Une solution sera trouvée, après on ne peut pas encore savoir si cette solution sera :
- définitive (les évolutions / revirements de jurisprudence existent, surtout pour les problématiques un peu nouvelles)
- satisfaisante (mais ça ça dépend pour qui ...)

pour l'instant il est difficile de se prononcer, ça va dépendre du cas qui posera problème, et de toute manière il faudra attendre quelques années pour que la jurisprudence soit stabilisée.

L'une des clés de la solution sera le taux de diffusion des LL sous GPL dans la société française, et le taux/nature de problèmes juridiques

Voici par exemple quelques éléments de discussion des arguments que tu cites (mes exemples sont aussi complètement discutables) :

1. délimitation des droits cédés :

exact, les contrats de cession de droits d'auteur sont construite en sens inverse : une looongue liste des droits cédés par l'auteur à l'utilisateur, avc le principe que tout ce qui ne figure pas explicitement dans le liste n'est pas cédé. Historiquement, cette règle avait pour objet de protéger les auteurs qui cédaient leurs droits, on considérait que le rapport de force économique et juridique ne leur était pas favorable.

la philosophie de la GPL repose sur un renversement : au lieu de décrire les droits cédés (d'où on déduirait en négatif les droits des utilisateurs), on décrit les droits de l'utilisateur (d'où on déduit en négatif les droits cédés)

Pour le juge, 2 attitudes :
- l'interprétation littérale basique sur le shéma "la loi c'est la loi" = le cession est nulle = les conséquences seront excessives et disproportionnés
- une interprétation plus "contextuelle" = une reconstruction du raisonnement de la GPL et sa validation en considérant que c'est clair et que c'est un texte d'origine 'étrangère'
- il y a bien sûr toujours la possibilité d'une modification de la loi = de l'article du CPI par le parlement


2. l'exonération de responsabilité à l'égard des consommateurs

exact, mais :
- ça ne s'applique qu'en cas de "vente" du logiciel ...
- ... en cas de vente à un consommateur (et cette notion est parfois fluctuante en jurisprudence) ...
- ... en cas de vente par un professionnel
- ... et en cas de défaut du logiciel causant un préjudice direct et quantifiable au consommateur

autant dire qu'on a déjà toute une grosse série de problèmes qui est évacuée directement : pas de vente, pas de consommateur, pas de professionnel

pour les autres cas, on a des mécanismes correcteurs qui peuvent jouer, par exemple les obligations de conseil, d'information et de réalisation des prestations par le professionnel : si la responsabilité n'est pas engagée au titre du LL (le produit vendu et installé), elle peut l'être au titre du service qui va autour (la vente d'un LL correspondant aux besoins / compétences de l'utilisateur, une installation bien faite et des paramétrages tenant compte de la machine et de la manière dont elle est utilisée.

on a également des mécanismes correcteurs qui peuvent jouer, cette fois pour exclure la responsabilité, par exemple la théorie juridique dite "de l'acceptation des risques" : tu savais que le LL/GPL était sans garantie, le service annexe a été correctement effectué = tu assumes.


3. le droit applicable

exact également, mais les règles juridiques de résolution de ce problème existent. La principale difficulté vient de leur application, ce sont des règles assez techniques et qui ne sont pas manipulées tous les jours par tous les juristes. Ceci dit le droit international privé existe justement pour régler ce type de problèmes ...

**

Il est également exact que CECILL a été rédigée pour répondre directement à ces petites difficultés. Il est vrai qu'elle a un côté sécurisant pour les chercheurs (et pas que, également pour tous ceux qui souhaitent utiliser ce contrat de mise à disposition de droits)

L'un des arguments des ***anti-CECILL*** (le terme est bien trop fort) est qu'il aurait été plus simple de franciser la GPL plutôt que de faire une nouvelle licence, car c'est cette multiplication des licences assez proches qui est génératrice d'insécurité juridique, prend par exemple le cas d'une diffusion du LL à l'international, où la GPL est plus connue que CECILL.

Bon, maintenant il faut quand mm pas perdre de vue que les licences libres sont un phénomène économique, social et juridique assez nouveau et novateur, qu'ont vit l'époque formidable de l'essuyage des platres, et que dans 5 ou 10 ans tout ça sera tassé.

Pas si simple hein ? le droit est un monde-univers assez complexe, il y a parfois plusieurs variables absolues/relatives à combiner/ajuster/neutraliser avec des constantes relatives/moins relatives

;)

(pour moi la GPL tient globalement la route en droit français, ama faut pas trop se focaliser sur les buissons qui sont devant la forêt)

ps. merci de ce débat. je pense aussi que le droit doit être approprié par tous ceux qui veulent comprendre, et pas réservé aux juristes.
LS.

Messages : 3602

Jeu 06 Oct, 2005 12:42

druith a écrit:Je comprends ton point de vu, ceci dit, il en existe déjà pas mal des licences libres...


C'est d'autant moins une raison pour en rajouter...

Or, le texte de CeCILL n'est pas plus obscur qu'un autre,


Oui, ben, il faut le lire quand même. Quand un logiciel est sous GPL, tu sais ce que ça veut dire, il n'y a pas besoin de relire la GPL une n-ième fois.
La plupart des gens ne sont pas à l'aise avec les choses juridiques, ce serait peut-être bienvenu de ne pas leur compliquer la tâche.

A mes yeux on est dans l'esprit du libre avec cette démarche. Un nombre de chercheurs ne se sentaient pas en sécurité avec la GPL face au droit français


Si c'était une initiative de chercheurs, on aurait vu leur nom quelque part : quand on fait un travail scientifique, on ne le garde pas pour soi, on le publie. De plus, on communique ensuite (autrement qu'avec des communiqués de presse) et on accepte le débat public. Sans compter que la première des choses à faire si on travaille sur la communauté du libre, c'est quand même de prendre contact avec la dite communauté. Ou alors on passe à juste titre pour un guignol.
La Cecill est clairement une initiative de médiatisation de la part de l'INRIA & co., cela n'a rien à voir avec les questions légitimes d'un chercheur.

Plus il existe de licence et plus il y'a de nuances possibles. Tout y devient certes plus complexe, mais par là-même plus riche.


Il n'y a pas de richesse en plus, puisque ce n'est qu'une réécriture nationale de la GPL. Juste de la fragmentation, de la complication inutile, du patriotisme à trois centimes. Ces idiots n'ont absolument pas compris comment fonctionnent les communautés du libre, ils croient qu'en introduisant des ségrégations géographico-juridiques ils vont attirer les aplaudissements et les louanges de tous.
AntoineP

Messages : 1038

Jeu 06 Oct, 2005 14:12

Merci LS... je me coucherais moins con ce soir :wink: .

C'est vrai que l'on sait ce que contient la GPL et que ça évite de lire une licence par logiciel. Toutefois, ce que je trouve intéressant avec CeCILL c'est son coté rassurant. La GPL fait encore peur par moments, et quelque soit le but réel des types qui ont pondus CeCILL, il n'en reste pas moins que cette licence est rassurante. Quand tu ponds un logiciel, que tu es un simple français et que tu parles pas très bien anglais, tu as sous la main quelque chose qui tient la route et qui te convainct de mettre ton programme en Open Source. Ce n'est certes pas une fin en soi, mais j'estime (on l'aura compris) qu'il s'agit d'un bon tremplin pour ensuite se lancer vers le GPL, ou même pour réfléchir sur certains aspects de cette licence GPL qu'on nous présente comme un fait acquis et incontournable...
Suse 10.0 X86_64 sur notebook hp pavilion zv6000 [http://druith.free.fr].
druith

Messages : 73

Jeu 06 Oct, 2005 18:24

tu es quand mm plus modeste que crétin.

le côté rassurant d'une licence est effectivement important, c'est l'une des raisons pour lesquelles je suis très favorable aux CC-NC ; je trouve aussi que ce côté 'tremplin' ou 'passage en douceur' est psychologiquement important : autour de la création il y a une licence (l'encapsulage juridique qui permet à l'oeuvre de circuler dans le monde ... avec les petites marmottes qui prennent le papier :), mais derrière la création et la licence il y a un humain, avec ses connaissances, ses certitudes, ses doutes, ses questions et ses besoins de sécurité.

les praticiens savent que le type qui vient les voir avec un problème juridique n'attend pas qu'une réponse juridique : il a besoin d'être rassuré, d'avoir une solution à SON problème, et son problème dépasse largement la simple question juridique.

maintenant une fois qu'on est dans le sas, au chaud et en douceur, autant continuer : l'accès à l'information sur la GPL est relativement aisé, et le pasage au full libre n'est pas complètement intuitif. passer d'une logique d'intérêts particuliers à une logique d'intérêt collectif n'est pas simple, et comprendre qu'il y a beaucoup plus à gagner d'une diffusion large ne se fait pas sans un certain stress, surtout lorsque'il s'agit de sa création, à laquelle on est -par définition- très attaché.

il n'y a pas que le droit qui n'est pas simple, il y a aussi les affects.
LS.

Messages : 3602

Jeu 06 Oct, 2005 22:10

tu es quand mm plus modeste que crétin.

Je ne sais pas s'il s'agit vraiment d'un compliment, mais je relève tout de même la politesse :).

Heureux d'avoir eu cette discussion. Je remercie tt le monde (AntoineP aussi bien sûr) et m'excuse si je suis parti en vrille à un moment, c'est juste que je me sui senti chatouillé... Mea Culpa.

@bienôt sur framagora :wink:
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druith

Messages : 73

Jeu 06 Oct, 2005 22:28

si si c'est une sorte de compliment, mais on a ses pudeurs :))

a++donc
LS.

Messages : 3602

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