Bonjour,
leviathan a écrit:Bonjour,
aujourd'hui, j'ai envie de me faire l'avocat du diable vu que les personnes pour ce projet de loi sont peu nombreux à s'exprimer sur ce forum (ce que je peux comprendre vu qu'il y a tout de même une certaine forme d'agressivité de la part de quelques membres parfois)
Ce que je vais dire ici, je ne le pense pas forcément, j'essaie simplement de me mettre à la place des personnes qui sont pour ce projet de loi. J'aimerais avoir l'avis argumenté et sans agressivité de toutes les personnes (pour et contre) qui se sentent de répondre.
Pourquoi les DRMs sont une nécessité:
tout simplement car les humains et les français en particulier sont des roublards qui essaient toujours de payer le moins possible même si cela se fait au détriments d'autres personnes. C'est pourquoi, les DRMs doivent être mises en place afin d'obliger les personnes à payer ce qu'ils doivent sinon ils ne paieraient jamais les disques. Car pourquoi payer quelque chose que l'on peut trouver gratuitement avec une qualité quasi comparable pour la plupart des gens.
Il y a toujours eu deux extrêmes dans la considération sociale de l'être humain : d'un côté l'Homme est bon, de l'autre l'Homme est mauvais. Et bien sûr une infinité de positions plus ou moins floues entre ces deux extrêmes. Dire que tout le monde est roublard : c'est se mettre en porte à faux. A quoi bon définir une loi que tout le monde va contourner puisque tout le monde est roublard.
Le principe actuel des lois, en France, est de partir du "Contrat Social" de Rousseau pour réguler les relations inégales qui peuvent exister entre les individus. Et notamment, il s'agit de protéger les plus faibles contre les plus forts. Ici, cette loi est demandée par les plus fort.
En effet, le système économique dominant est libéral. Celui qui possède le plus d'argent a plus de droit (position à réguler en fonction des pays et de leur législation). Ne pas oublier, qu'aux Etats-Unis se développe la notion de "one dollar, one vote". Celle-ci est d'ailleurs présente dans les CA d'entreprises côtées en bourse : le temps de droit de parole est défini en fonction du nombre d'actions possédées (cf. l'affaire Universal Vivendi avec Jean Marie Messier et les petits actionnaires).
Et c'est ce qui se passe aujourd'hui, avec cette proposition de loi : elle est demandée par les plus forts, ce qui est une contradiction avec notre Constitution et nos droits. Il y a contradiction avec leur propre principe libéral : le marché devrait s'autoréguler. Ce qu'ils ne veulent pas parce que cette fois-ci il n'y a pas de contrôle possible, ils font donc appel à l'Etat qui est issu du Peuple.
Leur comportement est un véritable paradoxe, sauf si on considère qu'il sagit d'une pure stratégie commerciale : nous attacher à leur produit sans possibilités d'aller voir ailleurs (ou alors très difficilement) .
Mais alors...
Comment expliquer que le système du shareware fonctionne encore ? Comment expliquer que le logiciel libre est une alternative viable (avec des tâtonnements au début, mais c'est normal) ? Comment expliquer que l'Etre Humain donne de son temps pour tenter de rendre la vie meilleure et pas seulement qu'à soi-même ?
Dès le départ, on nous culpabilise. On nous infantilise : vous n'êtes pas capable d'agir correctement, on va vous y obliger parce que nous savons ce qui est bon pour vous, et finalement pour nous.
Du côté de l'artiste : la relation actuelle entre l'artiste et son public est faussée par les intentions des Majors. Ce qui est envisagé, c'est le Star-System. Une icône a réussi : elle est au-dessus des masses bêlantes et ignares (puisqu'elles n'ont pas réussi). Tout artiste devra avoir l'ambition de devenir une icône, sinon... C'est l'échec. Le téléchargement illégal (parce qu'on ne s'est pas acquitté des Droits d'Auteur), fait peur. Sans qu'il n'y ait de cadre défini, l'artiste voit son oeuvre entre les mains de son public. Il n'existe aucun contrôle.
La Boîte de Production a deux objectifs pour l'artiste : assurer la distribution des oeuvres et créer un cadre d'épanouissement pour l'artiste. Sans être élitiste, il faut des années pour qu'un artiste devienne réellement intéressant (c'est-à-dire construire une oeuvre riche complexe et cohérente). Cela coûte en argent, mais aussi en efforts intellectuels et physiques. Avec le téléchargement, aucune des deux ne voient ses efforts récompensés. Elles cherchent donc à se protéger en se réfugiant dans la seule structure qui existe : le Star-System, structure au départ intéressante mais bien trop contraigante (ex : Claude Nougaro).
Aussi...
Comment certains artistes s'en sortent ? Prenons comme exemple : Thiéfaine, Louis Bertignac, M, Arthur H, Les Béruriers Noirs. La plupart d'entre eux se prononcent contre la DADVSI, la licence globale, les DRM, l'Antie-Copie et ils pensent que le téléchargement n'est pas néfaste. Ces artistes là ne pensent pas en Star-System. Certains sont mêmes en-dehors, certes ils ont galéré mais le combat s'est fait contre les Majors/Star-system pas contre le public. M est le plus bel exemple actuel : c'est le public qui l'a imposé aux Majors (il y en a d'autres, bien sûr). D'autres attendent : Mathieu Boggaerts, Philip Katherine, etc...
Les DRM détruisent la notion de Droits d'Auteur. La relation n'est plus que Distributeur/Public. L'artiste/auteur passe en second plan. Entre le Droit d'Auteur et le Droit du Lecteur, le premier doit d'effacer en faveur du second (Victor Hugo). On nous refait le coup des bibliothèque : c'est le même principe. Contrôler l'accès à la culture par l'argent : tout devient marchand. Nous ne pouvons nous construire qu'en consommant. Si tu consommes tu es un individu, sinon tu n'es rien.
Lorsque l'on regarde les études menées sur les fraudes (sécurité sociale, chômage), on se rend compte que ce n'est le fait que d'une minorité. Souvenons-nous de la tentative par Edouard Balladur, au milieu des années 90, de nous faire croire que les fraudes expliquaient les déficits. Les résultats n'ont pas été publiés à grand renfort de médiatisation, et pour cause...
leviathan a écrit:Mais c'est refuser la présomption d'innocence?
Non pas vraiment car on pourrait comparer cela à un vélo et à un antivol. J'ai beau respecter la presomption d'innocence, je ne laisse pas mon vélo seul dans la rue sans antivol, malgré le fait qu'il y ait une pencarte "A vendre" dessus. Les DRMs agissent de la même façon, on vend une musique mais on la protège du vol au cas où. On n'accusse personne, mais on protège son bien, tout come pour le vélo où on accusse personne de vouloir voler son vélo mais on le protège au cas où.
La présomption d'innocence repose sur le fait qu'il faut prouver l'acte délictueux et non prouver son innocence. Les sanctions doivent être effectives sur un constat de faits avérés. Avec les DRM, il s'agit de dire : vous piratez (ou vous allez le faire) donc on vous fait payer pour qu'on n'en subisse pas les conséquences (qui ne sont que présumées : aucune études sérieuses aujourd'hui ; fantasmées : on réagit sur la crainte de). Dès le départ, on est coupable d'un fait supposé.
Je ne fais pas payer le prix de mon antivol parce que je subodore qu'on va me voler mon vélo.
Le problème de la comparaison avec les biens matériaux, est que justement ils sont matériaux. L'oeuvre numérique se voit multipliée sans les contraintes physiques d'autrefois. L'oeuvre existe en tant que telle maintenant et c'est ce qui est révolutionnaire. Ce n'est pas la technique comme on le croit souvent (Roland Barthes).
Le vélo, si je le met à disposition d'autrui (comme la musique), je ne partage rien. Son absence me le rappelle. Avec l'oeuvre numérique quand je partage, je ne perd ni l'oeuvre, ni le partage. Avec les DRM, la notion de partage est niée. L'Homme ne peut plus communiquer que par possibilité de droit d'avoir.
Si j'ai, si tu n'as pas : on ne peut communiquer, partager.
Si j'ai, si tu as : on peut communiquer, partager.
On voit deux groupes se dessiner : ceux qui ont et donc peuvent partager ; ceux qui n'ont pas et donc ne peuvent pas partager. Donc ceux qui n'ont pas s'isolent, ne communiquent plus, ne partagent plus. Ils deviennent des autistes culturels. On augmente le fossé de l'accès à la culture qui est une forme d'accès à la réussite sociale (Pierre Bourdieu).
Partager devient du vol, nous devenons alors des délinquants. En tant que délinquants, il est normal qu'on nous retire des droits. Empêcher les gens de communiquer entre eux est une façon de partialiser les hommes entre eux. C'est une manière de garder le contrôle sur le comportement des individus. Avec ce système on sépare les Hommes par la culture.
leviathan a écrit:Les DRMS violent notre vie privée.
Non, une licence (le fichier nécessaire à l'ouverture du fichier audio DRMisé) n'est pas forcément nomminative. Donc il est impossible de savoir qui lit quoi, si ce fichier n'est pas nomminatif. De plus, lorsque vous payer un CD avec votre carte bleu, il existe aussi un risque pour votre vie privée, or vous payer pourtant toujours plus en carte bleu.
Les DRM s'appuie sur la machine pour identifier l'origine de la lecture. Cette machine appartient bien à une personne et contient certainement des informations personnelles, la gestion informatique de DRM permet l'accès à ses informations. Chacun fait ce qu'il veut avec sa machine.
De plus ces sociétés de gestion de DRM peuvent avoir accès à des informations sur des personnes qui n'ont pas acquis le droit sur ce DRM, tout simplement parce qu'on l'écoute sur une autre machine que la sienne. Très fort. Nous devenons des partenaires commerciaux qui fournissent des informations précieuses pour ces sociétés.
Ce n'est pas parce que le paiement avec la carte bleue présente un risque pour nos données privées qu'on doit accepter ce risque avec d'autres systèmes contraignants. Les risques s'accumulant, à quoi bon protéger et se protéger. C'est admettre que les failles existent et qu'elles sont importantes. Pourquoi déployer autant de précautions et d'investigations pour que l'on puisse accéder à une oeuvre ?
leviathan a écrit:Les DRMs ne gènent que les personnes honnetes.
pour le moment c'est vrai. Mais grâce à la DADVSI, l'interpolarité va devenir un réalité et la très grande diffusion de fichier avec des DRMs de plus en plus sécurisé va: empêcher le vol de fichier musicaux (ou autre) et garantir à l'utilisateur ayant légalement acheté ses musiques de les écouter où il le souhaite.
D'abord ils gênent toutes les personnes. Admettre qu'ils gênent les personnes honnêtes, c'est avouer qu'ils ne visent pas les cibles escomptées. S'ils ne gênent pas les bonnes personnes dès le départ, comment le feront-ils après ?
Il faudra les améliorer donc gêner les personnes honnêtes encore une fois. A quoi peuvent servir ces DRM s'il y a des personnes honnêtes ? Elles ont l'air d'être nombreuses pour qu'il faille en tenir compte. On peut dire que c'est improductif.
Dire qu'il y a vol de fichiers musicaux est difficile à définir. Y a-t-il vol ? L'oeuvre existe toujours et reste aux mains du propriétaire initial.
La question qu'il faut se poser serait plutôt : comment accéder à une oeuvre numérique ? comment la partager avec l'artiste sans que cela lui soit préjudiciable ?
Les DRM empêchent d'écouter les oeuvres où on le désire. Restriction des systèmes d'écoute en terme de technique, de temps, de lieu et de nombre : avec quoi ? quand ? où ? autant de je le veux ?
La pérennité n'est pas assurer puisqu'elle dépend de l'autorisation des sociétés de gestion des DRM. Elle dépend aussi des capacités techniques et de leur évolution (format, qualité[1]). C'est un système qui désire s'autoentretenir : renouveler les droits pour renouveler le parc matériel et ainsi les oeuvres numériques.
[1] On peut très bien imaginer qu'ils proposent différentes qualités à différents prix.
leviathan a écrit:Pourquoi interdire le contournement?
De nombreuses personnes souhaitent pouvoir contourner les protections à diverses fin. Mais si les protections sont contournées alors le problème sera le même qu'aujourd'hui et nous n'aurons pas progressé. La situation actuelle n'est pas un équilibre entre auteur et utilisateur or les droits d'auteur ont été créé pour justement maintenir cet équilibre.
Parce qu'ils savent que le contournement est toujours possible. Les DRM remettent en cause les Droits d'Auteur. Le droit de créer et d'en vivre devient le droit de consommer. Avec ce système : les Majors contrôlent les artistes, la distribution et les utilisateurs. C'est un système totalitaire sous aucun contrôle impartial.
Effectivement, les Droits d'Auteur maintiennent un équilibre : c'est sans doute pour cela, qu'actuellement, le téléchargement n'a en rien menacé les artistes. Il faut se rappeler que ces Droits d'Auteur n'appartiennent pratiquement pas à leurs auteurs mais sont entre les mains des Majors (cf. Johnny Haliday et Vivendi Universal). En tout cas c'est le flou artiste le plus total en ce domaine et ce problème génère de nombreux déboires.
leviathan a écrit:Voilà c'est déjà fini. Je le repete encore une fois:
1. je me fais l'avocat du diable, je ne pense pas forcément ce que j'ai écrit et j'ai même parfois des arguments contre ce que j'ai écrit (que je n'exposerais pas pour le moment)
2. le débat doit rester courtoie et les réponses argumentées (je ne veux pas de: c'est des connerie.)
Cordialement,
Léviathan
Cordialement.
Euryale.
EDIT du 01/03/06, 20 h 02 : il y a eu plusieurs edit de ce post, correction de phrases, d'orthographe, complément d'informations, éclaircissements...