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La croisade bien pensante contre les droits d'auteur

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Un forum en collaboration directe avec le site Veni Vidi Libri.

Mar 31 Mai, 2005 08:14

Deux avocats se rebiffent dans Libération contre l'hostilité croissante au droit d'auteur qui sévit dans certains milieux.

L'hostilité croissante au droit d'auteur qui sévit dans certains milieux depuis quelques années affiche une bonne conscience qui la fait ressembler à une croisade. Les créateurs, artistes et producteurs devraient ainsi applaudir sans réserve à la thèse du dépérissement progressif de leurs droits qui s'installe aujourd'hui en France. Tout ce qui fait droit aux revendications contre la propriété intellectuelle est désormais marqué du sceau du progressisme tandis que tout ce qui respecte ses règles est réactionnaire. Ce discours biaisé ne devrait tromper personne, et pourtant, il y a encore quelques semaines, une coalition d'artistes, politiques et intellectuels demandait la «libération» de la musique et l'arrêt des poursuites contre les téléchargeurs. Le slogan «Libérez la musique», loin de n'exprimer qu'une solidarité compassionnelle à l'égard d'un monsieur Tout-le-monde dont le jugement ne vaudrait que pour l'exemple, expédie en une formule définitive le droit de la propriété intellectuelle.


L'effacement progressif de l'Etat au profit du libre arbitre du consommateur peut être lourd de conséquences.
Droits d'auteur, respectons les règles
Par Lucie WALKER et David FOREST avocats à la cour.
Libération (Rebonds) - lundi 30 mai 2005
aKa

Messages : 7721
Géo : Roma

Mar 31 Mai, 2005 11:24

absolument d'accord avec ce point de vue, je suis ravi qu'Aka en ait fait part : merci de remettre (contribuer à remettre) les pendules à l'heure.

Bien :P
jurisjazz

Mar 31 Mai, 2005 14:19

Je suis ravi également qu'aKa fasse passer l'information, en copiant allègrement un grand paragraphe de cet article (droit de citation - droit de citation - droit de citation).

Par contre je suis assez peu d'accord avec le point de vue exprimé. Il est certes très cohérent dans sa défense de la primauté de la Loi sur l'usage, mais cette sacralisation de la Loi me semble tout aussi dangereuse que le possible avènement d'une ère de la loi "libre-service". Les lois, ça change régulièrement, de nouvelles sont introduites, d'autres sont modifiées... sans compter les variations d'un pays à l'autre. Conséquence de la "mondialisation" : on commence à s'intéresser un peu aux lois des autres pays, que ce soit pour s'en inspirer ou pour marquer notre différence ; mais surtout, on prend conscience du fait que d'autres réponses sont possibles. Alors certes, ça peut provoquer des abus, mais l'un dans l'autre ça me semble être une évolution positive.
La loi ne doit pas être érigé en objet inattaquable et non critiquable ! Certes cette critique doit prendre, au sein du contrat social, des formes spécifiques (en gros critique raisonnée et proposition d'améliorations - dépôt de nouveaux projets de loi -, à opposer à l'infraction pure et simple), mais même là les limites ne sont pas aussi nettes. Qui de la désobéissance civile ? pourrait bien demander un projet sujet de bac de philo (que le JT de 20h abordera en 9 secondes chrono). Pour ma part je n'ai pas de réponse, mais je suis heureux de voir que certaines personnes en ont, et viennent nous les apporter gracieusement. Qu'elles en soient remerciées...

Mais même sans aller jusque là :
Un gros problème avec cet article : il généralise allègrement, en passant du domaine très particulier de la propriété intellectuelle à celui de la Loi en général. Aussi si certains juges, juristes ou journalistes sont trop permissifs au goût des deux auteurs de cet article, et s'ils ont tendance à légitimer des pratiques "illégales" ou à la limite de la légalité, il faut rappeler que ça reste dans le contexte très particulier de la propriété intellectuelle. Il ne me semble pas que les juges "permissifs" aient décrété que le meurtre pourrait être, pourquoi pas, justifiable, vu que la loi, finalement, on s'en fiche à moitié. Ou que les attouchements sur mineurs (ou sur majeurs!) sont justifiables, vu qu'à l'instar d'un "accès à la culture" qu'il faudrait protéger, l'accès à l'objet sexuel serait un droit de l'individu. Ou que le détournement de fond... accès à l'argent, etc.
Donc évitons de mélanger les torchons et les serviettes : il y a peut-être une remise en cause de la notion de propriété intellectuelle, mais de là à dire qu'il y a remise en cause de la notion de Loi, il y a un pas, franchi allègrement par les auteurs de cet article, et qu'il n'aurait peut-être pas fallu franchir.

Enfin qu'une remise en cause intellectuelle de la notion même de "propriété intellectuelle" (ça veut dire quoi exactement ?) ne me semble pas être en contradiction totale avec le contrat social... Qu'est-ce donc que cette propriété de l'immatériel, qui se transmet aux héritiers comme on transmet un meuble... non, pas tout à fait : paye-t-on des droits de succession sur les biens intellectuels ?

Si j'estime que les droits étendus à 70 ans après la mort de l'auteur sont une "absurdité" obtenue contre toute logique économique sous la pression de certains "industriels du divertissement", on peut y voir une négation de la Loi et du contrat social si on veut, mais à mon humble avis on se plante.

Si j'estime que le "tout-payant" de la "consommation culturelle" est un système qui n'avantage ni le public, ni les auteurs, je ne vois pas en quoi ça ferait de moi un anarchiste. Et cela vaut pour le débat en 2000 sur la gratuité dans les bibliothèques publiques : j'ai passé mon enfance et mon adolescence à lire des livres empruntés à la bibliothèque. Le groupe dont j'ai le plus d'albums (achetés) est un groupe découvert via la médiathèque. Si maintenant, alors que je ne fréquente plus beaucoup les bibliothèques, je transpose cette curiosité culturelle au domaine du peer-to-peer, je suis un anarchiste... alors va pour l'anarchie et le couteau entre les dents (mon couteau s'appelle seeding).

Je fais sans doute dire à l'article, dans ces derniers paragraphes, des choses qu'il ne dit pas... mais je voudrais juste signaler que le débat est large, que les pratiques sont variées... et que la sacralisation de la Loi est dangereuse car elle étouffe le débat.
Voilà, en gros...

PS: vous remarquerez que je n'ai traité personne de "réactionnaire"... vu que je me méfie comme la peste de la notion de "progrès", qui elle aussi mérite qu'on en débatte, mais je digresse.
mpop

Messages : 777
Géo : Lyon

Mar 31 Mai, 2005 16:27

sacralisation de la loi non mais respect des auteurs

la Loi les juges (la constitution) ce ne sont pas des éléments externes à la société... n'oublions pas que la loi c'est nous qui la faisons et la modifions, par le biais de nos représentants (ou directement; Loi fondamentale et référendum)

et puis le " X mp3" via peer to peer en tant que liberté fondamentale ça va un peu :|

(cela fait des années que je veux me payer les intégrales de Bird, mais à chq fois y a une facture etc à payer... alors je patiente, je ne me sens pas pour autant frustré en tant citoyen homme libre... perso aussi j'aime bien qd on paye mon travail... ET VOUS ? ) :D

je suis un anarchiste

j'avais pas vu: anar version 2005: téléchargement des MP3 ?
Ah MDR de mieux en mieux :P

bon allez saludos amigos.
NI Dieu Ni IPOD :P
jurisjazz

Mar 31 Mai, 2005 21:44

je suis un anarchiste

j'avais pas vu: anar version 2005: téléchargement des MP3 ?
Ah MDR de mieux en mieux

En lisant un peu mieux on s'aperçoit que ma remarque était ironique et faisait référence à l'utilisation à tort et à travers du terme anarchiste qui perd ainsi tout son sens. D'où la facilité à se l'accoler avec les justifications les plus futiles (je fais du seeding de contenu copyrighté sur bittorrent... wéé...).

L'article ne fait pas directement référence à l'anarchisme mais invoque:
- la « dangereuse illusion de Proudhon » (quand même!)
- le mépris égoiste de la loi (caricature habituelle de l'anarchisme).
D'où mon "trait d'humour".

D'autre part, je n'ai jamais prétendu que le P2P correspondait à une liberté fondamentale. Il faut juste rappeler que :
- sa légalité ou son illégalité ne sont pas tout à fait établis. Pour cela, il faudrait clarifier la loi ; 'est d'ailleurs le mouvement entrepris (pas dans la bonne direction selon moi, mais bon...), ce qui montre bien que la loi évolue. Je trouve également que dénoncer la permissivité des juges et des médias dans une période où des usages nouveaux sont en train d'être redéfinis par la loi, c'est assez gonflé.
- le fait de se focaliser sur la seule loi permet de rejeter un débat bien plus large, qui doit être mené. Et tant que les conclusions de ce débat ne seront pas établies, ça me semble logique que certains artistes appellent au moratoire sur les poursuites judiciaires, par exemple.
- en parallèle de ce débat sur la propriété intellectuelle, il y a aussi un débat sur la place de l'artiste et de la culture dans la société. La culture n'est-elle qu'une marchandise, dont l'appropriation par des moyens non autorisés constituerait un vol ? Faut-il conserver en l'état un système économique qui ne fait vivre que 2 ou 3% des artistes ? etc.

Je maintiens que le fait de rappeller la loi est en soi une bonne chose... quand la loi est claire. Si elle ne l'est pas, il faut le dire. Et en discuter.
mpop

Messages : 777
Géo : Lyon

Mar 31 Mai, 2005 23:28

Il est ma foi normal que ces monsieurs dames défendent leur gagne-pain.

Mais voir un article aussi engagé faire croire qu'il appelle au bon-sens et au simple respect de la loi... j'ai un peu l'impression d'être pris pour un imbécile.
D'un autre côté, l'espoir est aussi bien réel de voir les juges forcer la notion d'exception de copie privée afin de recouvrir du voile de la légalité les pratiques de contrefacteurs que l'on se plaît à qualifier de «non professionnels».

Voilà qui me laisse doucement sourire...
Si j'en crois la subtile ironie de l'article, il serait évident que les gamins de 16 ans de ma classe qui "piratent" sont de dangereux "contrefacteurs", qu'on qualifie à tord de "non professionnels".
Et bien non, la plupart téléchargent pour leur usage personnel, et les mp3 et divX ne font que remplacer les VHS et les cassettes audios de leur parents. Alors certes, Internet offre des facilités de diffusion plus grande, mais la nature du "crime" n'en est pas changé (on parle bien de "piratage" après tout, le même terme qu'aux Philipines pour l'enlèvement ou l'assassinat de journalistes et touristes).
(Et au passage, à ce que je sache, la facilité de duplication n'est pas une circonstance agravante !).
Ce qui me paraît en tout bon-sens malhonnête, c'est justement de voir tout d'un coup comme de la contrefaçon quelque chose qui était jusque là vu comme de la copie privée, simplement parce que ça se généralise, et que ça remet en question un certain équilibre économique.
Si l'interprétation de la loi évolue, ce serait au contraire dans l'autre sens, il me semble : ce qu'on autorisait, on ne le tolère plus (quitte à punir pour l'exemple), depuis que ça remet trop en cause certains intérêts économiques.

Et puis, je vais me permettre un autre remarque.
Dans un post précédent du forum, Bill Gates traitait la communauté Open-Source de dangereux utopistes, de méchants communistes (faisant ainsi volontairement référence à une idéologie typiquement pernicieuse pour l'américain type , mais aussi à un modèle économique qui a partout avoué son échec - sauf peut-être dans les kiboutz des années 30-50).
Finalement, si on se replonge simplement quelques années en arrière, on peut voir que le mouvement Open-Source n'était pas considéré comme viable... simplement l'apanage de quelques illuminés.
En 2005, n'en déplaise à M.Gates, une bonne partie des leaders mondiaux de l'informatique s'intéressent de plus en plus près à ce nouveau modèle économique.

Aujourd'hui, on nous dit que la culture librement accessible, c'est du consumérisme, et une idéologie dangereuse. Ca ne vous rappelle rien ?
Le modèle de l'informatique libre s'est imposé assez vite, parce que l'informatique propriétaire est assez récente (fin 70, début 80).
La musique propriétaire, par exemple, est plus ancienne, donc les modèles récents de création semi-libres (CC...) ou libres (Art-Libre...) s'imposeront sans doute plus difficilement.
(Au passage, Jurisjazz, tu te demandes toujours pourquoi tu peux faire des Maths de haut niveau sous Linux depuis longtemps, alors que tu es obligé de passer par WinXP Pro pour tes logiciels de MAO ?)

Contrairement à ce que déclarent assez malhonnêtement les auteurs, ce n'est pas une histoire de bon-sens, mais un choix de civilisation.
Les mathématiques ne ce sont pas imposées comme libres "naturellement".
De Pythagore à Tartaglia, il y a eu une tentation de mathématiques "propriétaires" ou ésotériques.

Je termine en citant les auteurs.
L'avenir de cette dangereuse illusion semble prometteur

Comme la dangereuse illusion du logiciel libre l'était ?

Et sur ce, je vais me coucher -->[Zzzzz]
Nico

Messages : 841
Géo : Paris

Mer 01 Juin, 2005 10:29

Nico a écrit:(on parle bien de "piratage" après tout, le même terme qu'aux Philipines pour l'enlèvement ou l'assassinat de journalistes et touristes)

bonjour,

non, voir la différence entre piratage et piraterie.
Enfin, le droit quant à lui n'emploie ni l'un ni l'autre, il parle de contrefaçon.
leto_2

Messages : 2305

Mer 01 Juin, 2005 13:51

Ok, effectivemment tu as raison, le terme piratage est un néologisme qui remonte à la fin des années 70.
En général, je fais des recherches avant de poster, mais il était un peu tard ;-)
Piratage, subst. masc. Action de s'accaparer une production artistique ou intellectuelle pour en faire son profit. Une armée d'avocats venait d'obtenir une injonction sur deux posters et une statuette illicites d'Elvis (Presley), le fantôme du chanteur-roi était l'objet de «piratages» innombrables (Le Point, 20 août 1979, p.62, col. 2).

Par ailleurs, le verbe pirater était utilisé dans un sens assez voisin depuis le début du 18ème.
sources : le trésor de la langue française informatisée.

Je retire ce que j'ai dit sur le terme piratage.
Malgré tout, l'emploi systématique de ce terme m'agace.
D'une part parce qu'il est largement utilisé par les médias, et qu'il a une connotation assez forte (comme le montre mon erreur, et une confusion fréquente entre les deux termes...;)).
D'autre part parce que ce n'est pas un terme juridique, comme tu le rappelles à juste titre.
La question effectivement, c'est de savoir si, et quand, ça relève de la contrefaçon ou de la copie privée.
En recouvrant tout "sous le voile" du piratage, on dissimule le malaise qu'il y a à évoquer une contrefaçon au sujet de ces copies à usage privé. (La contrefaçon dans le domaine, on la voit effectivemment clairement par exemple quand on circule dans une bonne partie de l'ancienne Europe de l'Est, pour ne citer que des exemples proches. Difficile d'acheter des CDs de musique roumaine non gravés à Satu-Mare...)

Note: en anglais par contre, le même terme est utilisé pour les deux usages : piracy.
Il est vrai que l'anglais est souvent assez imprécis, et les confusions de vocabulaire se répercutent ensuite sur le français (ex. classique : "free" (costless) et "free" (freedom), qui explique en partie les confusions entre libre et gratuit)
Nico

Messages : 841
Géo : Paris

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