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Page 3 sur 3Précédent 1, 2, 3Hadopi censuré par le Conseil constitutionnel

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Mar 16 Juin, 2009 10:37

Il existe par exemple une bonne dizaine d'autorités administratives qui ont le pouvoir de prendre des sanctions. Il y a même une machine, qui s'appelle le radar, qui peut sanctionner un automobiliste qui va trop vite sur la route.

Et un bon vieux retour aux lettres de cachet ça lui plairait ? Je croyais que les politiques étaient là pour changer les choses. Peut-être qu'il aime se faire violenter par des machines ? :) je le soupçonne d'aimer se sentir esclave, alors une dizaine d'autorités. :twisted:
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Christian77320

Messages : 550
Géo : Seine et Marne

Mar 16 Juin, 2009 11:32

Pour compléter les analyses citées précédemment - et avec un peu de retard - je vous signale le communique de l'April :

HADOPI : les mouchards filtrants seront facultatifs.
Saisi par des députés de l'opposition sur la loi Création et Internet, le Conseil Constitutionnel a rendu mercredi 10 juin 2009 une décision particulièrement forte. Il s'oppose à la coupure de l'accès à Internet comme sanction administrative et ôte tout pouvoir de sanction à la HADOPI. Enfin, cette censure rend les mouchards filtrants facultatifs. L'April se réjouit de cette décision qui contribue à rééquilibrer les droits des auteurs et ceux des internautes.

On constate que le CC valide effectivement la labellisation des moyens de sécurisation, mais :

1/ La responsabilité de l'abonné ne peut être mise en cause pour justifier des sanctions, ni au pénal ni devant l'HADOPI, et tout ce qui rend cette responsabilité opposable (les moyens de l'exonérer, les sanctions et avertissements) a été censuré.

2/ Les moyens de sécurisation ne sont plus obligatoires dans la mesure où ils ne sont plus un moyen d'exonération de la responsabilité de l'abonné (ils étaient le seul moyen d'exonération que l'abonné pouvait maîtriser, les deux autres étant la fraude informatique et le cas de force majeure).

3/ La labellisation n'a été maintenue par le CC que parce qu'elle n'engageait pas de conséquences sur l'exercice des libertés publiques : les mouchards filtrants n'étant plus imposables ni indirectement par la loi ni directement par l'HADOPI, le flou autour des caractéristiques essentielles de ces dispositifs ne pose pas de problème constitutionnel.


Pour la suite, que peut-on déduire de cette décision si le CC respecte sa propre jurisprudence ? Je vois déjà quelques points :

- Aucune autorité administrative ne peut limiter l'exercice de la liberté de communication et d'information. On le savait, tout le monde l'avait dit, mais maintenant c'est confirmé par le CC et c'est tellement mieux comme ça :)
=> ni coupure d'accès à Internet, ni filtrage sans passer par l'autorité judiciaire. Concernant le filtrage il faudra tout de même rester méfiant notamment dans le cadre de la réforme de la justice (problèmes d'indépendance du parquet).

- Le CC a établi que la loi "Création et Internet" établit une présomption de culpabilité, ce qui est toléré en matière contraventionnelle ; mais que de plus cette présomption de culpabilité est irréfragable (l'accusé ne peut pas prouver sa bonne foi), ce qui ne peut être toléré en aucun cas, y compris en matière contraventionnelle. (On notera des différences essentielles ici avec les radars automatiques [1])
=> exit toute procédure basée sur un relevé d'adresses IP horodatées, avant de prendre la moindre sanction il faudra constater la matérialité des faits par des perquisitions et saisies de disque dur.

- La traque des internautes par des agents privés et le principe du filtrage ont été actés mais strictement encadrés, ce qui permet de limiter la casse. La validation de ces principes n'est pas une bonne nouvelle, mais c'est clairement un moindre mal par rapport à ce que prévoyait la loi HADOPI initialement et ça risque d'embêter sérieusement l'exécutif sur LOPPSI2.

- Enfin sur les "moyens de sécurisation", toute tentative de les rendre obligatoires se heurtera à la nécessité de définir leurs caractéristiques essentielles dans la loi. Cela sera un véritable casse-tête pour le gouvernement puisqu'il faudra alors s'assurer de leur disponibilité pour tous, quelle que soit la configuration, sans discrimination entre les abonnés ni entre les fournisseurs. Se pose alors par exemple la question de la gratuité de ces moyens et de leur interopérabilité. On peut aussi s'interroger sur la légalité de certaines caractéristiques comme le renvoi d'informations à un serveur distant ou le fait de contrôler les contenus échangés.
=> Pour le gouvernement, l'instauration du télécran, c'est pas gagné.


Pour finir, je ne résiste pas à l'envie de vous rappeler un petit dessin qui illustre assez bien la tendance au sein de l'exécutif : http://www.laquadrature.net/fr/dessin-de-la-semaine-21-webcam-ll-de-mars

***********
Note :

[1] De l'analogie avec le permis de conduire et les radars automatiques

La différence essentielle avec les radars automatiques réside dans le fait que le propriétaire d'un véhicule - c'est-à-dire celui dont le nom est associé administrativement à la plaque minéralogique du véhicule - peut aisément se rendre compte que son véhicule a été volé, et sait lorsqu'il l'a prêté à un tiers. Un véhicule automobile a une matérialité qu'une connexion à Internet n'a pas.
De plus, les photos prises par les radars automatiques sont associées à une heure, une date et un lieu, et permettent de s'assurer que la plaque minéralogique détectée correspond bien au véhicule flashé.
On sait également que le mauvais comportement des conducteurs est de nature à mettre en danger la vie d'autrui, ce qui n'a rien de comparable avec des atteintes à des biens matériels ou immatériels.
Enfin, le permis de conduire constitue une autorisation administrative, tandis que l'abonnement à Internet est ouvert à tous les citoyens.

Néanmoins, le permis de conduire permet l'exercice de la liberté d'aller et venir et son retrait ou sa suspension nécessitent une décision judiciaire, ce qui a d'ailleurs été rappelé utilement au niveau européen. Le retrait du permis de conduire ou sa suspension peuvent en outre faire l'objet d'un aménagement, par exemple lorsqu'il est essentiel à l'exercice d'une activité professionnelle ou dans le cas de personnes vivant isolées et sans transports en commun.
Sauf mention contraire, les propos tenus par l'auteure n'engagent que l'auteure elle-même.
Alix Cazenave

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