J'ouvre ce fil à cet effet (qui sera nettement plus mince, certes)
Si vous avez manqué le début :
Windows Vista : plus de 88 millions de copies vendues grâce à la vente liée
zdnet.fr, Christophe Guillemin, publié le 23 novembre 2007
www.zdnet.fr/actualites/informatique/0, ... 7-1,00.htm
Projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, n° 351, déposé le 31 octobre 2007
www.assemblee-nationale.fr/13/dossiers/ ... ateurs.asp
L'ordre du jour à l'Assemblée : www.assemblee-nationale.fr/agendas/odj.asp
Première séance du lundi 26 novembre 2007
Avant l’article 1er
M. le président. Avant l’article 1er, je suis d’abord saisi d’un amendement n° 240.
La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.
Mme Martine Billard. Cet amendement, déposé au nom des quatre députés Verts, est relatif aux ventes liées. Les règles prévues en ce domaine par le code du commerce ne s’appliquent pas en raison de diverses failles de notre droit – Jean-Paul Charié évoquait justement les difficultés rencontrées pour faire respecter la loi en matière de droit de la concurrence. L’article L. 420-2 du code du commerce doit donc être complété.
Monsieur le secrétaire d’État, lors de la discussion générale de ce projet de loi, vous avez prétendu, en répondant à un orateur du groupe socialiste, qu’il était aujourd’hui possible d’acheter des ordinateurs non équipés de logiciels et d’y installer ensuite le logiciel gratuit Linux. Vous le savez pertinemment, la réalité est tout autre : il est maintenant très difficile d’acheter un ordinateur qui ne soit pas déjà équipé par les produits Microsoft ou bien, mais moins souvent, Apple. Dans les enseignes de la grande distribution, le consommateur n’est pas en mesure de comparer les prix d’un ordinateur fournis avec logiciel et ceux du même ordinateur non équipé. Seuls les petits magasins ou Internet offrent cette possibilité.
Cette vente forcée des logiciels pose le problème de la transparence des prix. Le consommateur ne sait pas quelle part du prix correspond à celle du logiciel et quelle part correspond à l’ordinateur. Cela est d’autant plus difficile qu’outre le système d’exploitation, sont vendus aux consommateurs d’autres logiciels d’une utilité souvent très restreinte – ce dont il ne se rend pas toujours compte sur le moment – sans qu’il en connaisse le coût.
Par ailleurs, les versions des logiciels installés sont souvent bridées par rapport aux produits vendus sans ordinateur. De plus, il faut rappeler qu’en France et en Europe, les prix de certains logiciels sont particulièrement élevés, ainsi, le logiciel Vista coûte 213 euros de plus en Europe qu’aux États-Unis. Enfin, le consommateur qui se trouve obligé d’acheter un ordinateur équipé est confronté aux problèmes posés par les mises à jour et les changements de logiciels. Le passage de Windows 95 à Windows 98, celui de Millenium à XP ne se font pas gratuitement, le consommateur doit payer. Et comme il y a très peu de concurrence sur ce marché des systèmes d’exploitation, Microsoft se permet d’installer des versions qui sont particulièrement défaillantes et le pauvre consommateur a parfois un peu de mal à faire fonctionner son ordinateur.
M. le président. Madame Billard, il faut conclure.
M. André Chassaigne. Ce que dit Mme Billard est très intéressant !
Mme Martine Billard. J’en termine monsieur le président. J’ai beaucoup insisté sur les problèmes des consommateurs – j’aurai également pu évoquer la question de l’iPhone qui doit être commercialisé à la fin de l’année – mais se pose aussi la question de la concurrence, car pour les entreprises qui veulent vendre ou distribuer d’autres logiciels que ceux proposés dans l’actuel « monopole obligatoire », la tâche est particulièrement difficile.
Aujourd’hui, la DGCCRF ne répond pas aux plaintes des consommateurs, et pourtant les premières ne datent pas d’hier, la réunion qui devait avoir lieu et faire des propositions sur le sujet ne s’est pas tenue, rien n’avance ! Monsieur le secrétaire d’État, quand le consommateur pourra-t-il, s’il le souhaite, faire le choix d’acheter des ordinateurs non équipés, sans être obligé de faire les boutiques de l’avenue Daumesnil ou de passer par Internet ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Madame, vous le dites dans l’exposé sommaire de votre amendement : le code du commerce interdit l’abus de position dominante. Vous avez pris l’exemple de Microsoft, mais il faut rester prudent. Cet amendement qui vise à écrire dans le code du commerce que l’ensemble des accords d’exclusivité pourrait constituer un abus de position dominante est très dangereux parce qu’il existe des accords d’exclusivité qui n’ont rien à voir avec un abus de position dominante. C’est pourquoi la commission a rejeté cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme. Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur. Madame la députée, vous savez que le législateur s’est toujours attaché à trouver un bon équilibre entre le principe de la liberté du commerce et celui de la défense de l’ordre public économique.
Si votre amendement était adopté, le fabricant d’appareil photos ou d’un quelconque matériel qui choisit un distributeur pour un lancement promotionnel ne pourrait plus faire d’accord d’exclusivité. Pourtant, cette pratique commerciale profite au consommateur qui bénéficie d’une promotion sur le produit !
Nous considérons aujourd’hui que l’exploitation abusive des accords d’exclusivité est sanctionnée par le droit des pratiques anticoncurrentielles. La jurisprudence prend en compte la situation de dépendance qui résulte de ce type de contrats. il n’est donc pas opportun de légiférer sur ce point. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement, ce qu’il ne se trouverait pas dans l’obligation de faire si vous le retiriez.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
M. Jean-Yves Le Déaut. Je m’étonne un peu de la position que prend M. le secrétaire d’État Chatel car il n’avait pas la même lorsqu’il était le député Chatel. Comme moi-même, comme Christian Bataille, Mme Marie-Renée Oget, Philippe Tourtelier, ou comme Mme Corinne Marchal-Tarnus ; Luc Chatel a posé une question écrite au gouvernement sur ce sujet alors qu’il était député. À l’époque, monsieur le secrétaire d’État, vous souhaitiez « une lisibilité des prix affichés dans le cas de vente liée pour le matériel informatique ». En relevant un usage qui permet aux consommateurs de bénéficier de logiciel préinstallé, vous notiez que le prix de ce logiciel, que l’acheteur peut théoriquement refuser, n’est pas indiqué, « ce qui laisse croire qu’il s’agit d’une offre gratuite alors que l’on peut estimer le coût de ce logiciel à près de 25 % du coût total de l’achat ». Vous souhaitiez savoir s’il ne serait pas plus pertinent d’imposer un affichage qui distinguerait le prix de l’ordinateur de celui des logiciels préinstallés, ce qui permettrait une meilleure information des consommateurs qui pourraient alors choisir plus librement d’acquérir des logiciels ou non.
Député, vous aviez raison de poser une question écrite. Cette question aujourd’hui, monsieur le secrétaire d’État, nous vous la posons. Si on peut admettre que l’amendement défendu par Mme Billard n’a pas la meilleure rédaction possible, vous ne pouvez vous contenter de répondre par une pirouette et affirmer qu’aujourd’hui la situation est réglée par notre droit : ce n’est pas vrai !
En France et en Europe, la domination des matériels américains est écrasante et 95 % des ventes au grand public sont effectuées par un seul opérateur. Il n’y a pas de concurrence, nous sommes en situation de monopole. Comment cette situation peut-elle vous satisfaire, vous qui êtes des libéraux ?
Les logiciels préinstallés peuvent être pratiques mais, à la différence des particuliers, l’industriel qui commande des ordinateurs peut imposer qu’ils soient livrés sans logiciel. Finalement, la poule aux œufs d’or ce sont les 30 millions de personnes détentrices d’ordinateurs ou des téléphones mobiles car elles paient des logiciels préinstallés et sont victimes de ventes liées.
Mme Laure de La Raudière. C’est n’importe quoi !
M. Jean-Yves Le Déaut. Ce monopole n’est plus tolérable, tous ceux qui défendent le logiciel libre en France le soulignent.
Monsieur le secrétaire d’État, si cette situation vous satisfait, ne faites rien, mais vous aviez eu raison de posez votre question écrite et je regrette que vous vous en tiriez aujourd’hui par une pirouette. Les consommateurs ne l’apprécient pas non plus.
M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. La réponse que vous nous avez apportée ne vous fait pas honneur, monsieur le secrétaire d’État. Un débat de fond existe, vous le savez puisque vous en avez souvent été l’un des acteurs.
Votre argument n’est pas valable car l’amendement n° 240 vise les accords d’exclusivité dans la mesure où ils ont pour objet de limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence. Cet amendement ne prohibe pas systématiquement ces accords mais s’appliquerait à la situation actuelle de la vente des ordinateurs équipés de logiciels préinstallés.
Le consommateur devrait pouvoir choisir, dans n’importe quel magasin de la grande distribution, entre un ordinateur sur lequel Windows est préinstallé – et il doit alors être informé de la part du prix d’achat correspondant au logiciel – et un ordinateur où il ne l’est pas et sur lequel il installera lui-même soit un système d’exploitation libre, soit Windows. La situation actuelle est dénoncée par de nombreuses associations de consommateurs, dont les plaintes n’avancent pas car, contrairement à ce qui a été dit, la DGCCRF a manifestement pour consigne de ne pas intervenir.
Monsieur le secrétaire d’État, vous qui vous dites libéral et qui, en tant que tel, défendez la concurrence, vous devez permettre aux consommateurs de choisir sans qu’ils soient obligés d’acheter leurs ordinateurs sur Internet ou dans des boutiques très spécialisées.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Monsieur Le Déaut, il convient de garder son calme et d’éviter de mélanger des règles relatives à la concurrence et d’autres qui concernent la consommation. Il ne vous a pas échappé, ni à Mme Billard, que l’article L. 122-1 du code de la consommation prohibe déjà la vente liée. La règle est donc déjà fixée dans la loi.
M. Jean-Yves Le Déaut. Elle n’est pas respectée !
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Néanmoins, le juge a considéré jusqu’à présent que l’intérêt du consommateur était avant tout que l’ordinateur fonctionne. Il n’a donc pas exigé une application stricte du droit.
Ce sujet m’intéresse autant comme secrétaire d’État qu’il m’a intéressé comme député. C’est la raison pour laquelle nous avons confié des travaux d’expertise à la DGCCRF. Parallèlement, une association de consommateurs a souhaité lancer une nouvelle action en justice, ce qui a eu pour effet de geler les discussions en cours. Le jugement est attendu pour le début de l’année 2008. Il est bien évident que les travaux d’expertise de la DGCCRF seront versés au dossier examiné par le tribunal. Nous verrons alors si la jurisprudence évolue. Mais, encore une fois, ce n’est pas un problème d’ordre législatif car, sur le plan légal, la vente liée est d’ores et déjà interdite.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 240.
(L'amendement n'est pas adopté.)
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