Maps a écrit:Quel genre de crise majeure ? Genre 2 pays fondateurs qui votent contre un traité lui aussi majeur ?
Ah bin non c'est déjà fait... Alors quoi d'autre ? Une révolution dans la rue ? Pour l'Europe ? Bon courage...
Quoi d'autre ? Je ne saurais le dire, mais « 2 pays fondateurs qui votent contre un traité lui aussi majeur », c'est bien une crise majeure, et même décisive, pour l'Europe telle qu'elle se "construit" actuellement.
Plus précisément, c'est le refus de nos grands tartuffes d'accepter la volonté populaire, celle que deux peuples ont exprimé par référendum, qui est une crise majeure pour la "marche en avant" de l'Europe.
Ce coup de force contre la démocratie marque un vrai tournant, celui où le décor s'efface devant la réalité.
L'Europe qui se construit actuellement est à la fois une réalité et une mascarade.
La réalité est très sombre comme nous pouvons le vérifier tous les jours (ou presque), un groupe restreint de puissants, de gens du beau monde, qui s'arrangent entre eux pour bâtir un grand marché dérégulé ; pour bâtir un espace de concurrence entre les peuples, et non de coopération comme devrait l'être une union ; où ils s'arrangent entre eux pour faire les lois et directives qui les arrangent, et qui neuf fois sur dix sont contraires à l'intérêt des peuples, à l'intérêt général ; ou les peuples n'ont quasiment aucun moyen d'intervenir, de participer aux décisions ou de s'y opposer.
L'Europe actuelle s'est construite, et se construit toujours, par des rapports de forces et de copinage entre "gens du beau monde", entre "puissants", sans la participation des peuples ; là où les nations actuelles se sont construites, plus ou moins bien, au fil de l'histoire, au fil des lutes et des rapports de forces entre les diverses composantes sociales de chaque nation, et particulièrement des rapports de force entre les peuples et les puissants.
Rien d'étonnant si le lobbying et la défense des intérêts des groupes de pouvoir y remplacent la démocratie et la défense de l'intérêt général, l'Union et ses institutions sont faits par et pour ces groupes de pouvoir.
C'est là le but réel de l'Europe réelle "qui va de l'avant" : construire une entité qui puisse aller de l'avant, sans s'encombrer des jérémiades de la populace qui, c'est bien connu, n'a pas le sens de ... de quoi au fait ?
La mascarade, c'est simplement la façade en carton pâte de belle union des peuples européens, pour le bien de tous, pour bâtir un espace de fraternité et de coopération entre les peuples d'Europe, dont le ciment serait la richesse et la diversité de notre culture, nos valeurs communes, au premier rang desquelles la démocratie que nous chérissons tous, sensée être le ciment autant que le but et la méthode de construction de l'Europe.
Aujourd'hui ce joli décor démocratique barrait la route à l'Europe réelle "qui va de l'avant". Qu'à cela ne tienne, il suffit de balayer ce décor inutile et l'Europe, la vraie, pourra continuer se marche en avant.
En balayant négligemment le résultat de ces deux référendums, l'expression la plus directe et légitime de la démocratie, nos gouvernants nous débarrassent de l'encombrant habillage faussement démocratique qui pouvait encore nous masquer la réalité, la vrai nature de l'Europe qui va de l'avant.
Encore faut-il que nous acceptions de regarder la réalité en face au lieu de détourner pudiquement le regard
Mais peut-être plus important encore à mon avis, ce coup de force nous permet de voir la vrai nature de la démocratie.
Si, alors que nous sommes sensés être en démocratie, nos gouvernants peuvent se permettre de refuser le choix clairement exprimé par le peuple, et de faire ce que le peuple à explicitement rejeté par référendum, c'est bien que notre démocratie n'est que de façade.
La démocratie ce n'est pas un mot, aussi joli soit-il ; ce n'est pas une définition dans un dico, aussi précise soit-elle ; ce ne sont même pas des institutions, aussi équilibrées soient-elles.
La démocratie n'a que la valeur et la réalité que nous lui donnons, elle n'a que la force de notre soutient et notre engagement à tous. Donner notre voix n'est qu'un geste symbolique, cela signifie juste que l'on est prêt à défendre notre choix.
Si nous laissons des gens décider à notre place, et même faire ce que nous avons explicitement refusé par les urnes, alors notre voix n'a aucune valeur puisque nous ne lui en donnons aucune, et notre belle démocratie n'est qu'un joli conte pour enfants.
Aujourd'hui face à ce coup de force, à ce viol de la démocratie, j'ai l'impression d'entendre un profond silence (ici même, en particulier, j'ai l'impression d'un silence de mort).
Pour certains ce silence reflète le sentiment d'impuissance écrasante dont tu parles.
Pour d'autres, ce silence est tout simplement complice, ou même revanchard.
Ceux là je n'ai pour l'instant rien à leur dire, puisque rien à leur répondre.
Mais nous ne pouvons pas accepter notre sentiment d'impuissance, surtout pas.
Nous devons le remplacer par par la volonté de lutter, nous devons exiger d'être entendus, nous devons forcer les imposteurs de la démocratie à respecter notre décision.
Si nous ne faisons pas cette démarche alors notre sentiment d'impuissance, d'incapacité à imposer à ces tartuffes ce que nous avons démocratiquement décidé, se transformera en frustration et colère. Nous finirons vite, très vite, par vouloir imposer par la force ce que nous pensions avoir imposé par les urnes.
Et si par malheur nous étions trop peu nombreux à réagir ainsi, si nous étions encore impuissants à faire valoir notre choix, nous aurions alors envie de détruire le système, de tout casser, de "brûler des bagnoles".
Je suis sur qu'alors on entendrait haut et fort les silencieux d'aujourd'hui, qu'ils seraient les premiers à être scandalisés par cette barbarie :
« Jamais, en aucun cas, on ne résout les problèmes par la violence, ce n'est pas civilisé et ce n'est jamais légitime.
Il faut rétablir "l'ordre", faire cesser ces violences, avant toute autre chose, avant toute "discussion".
Il faut rétablir la "démocratie" ».
Alors notre tartuffe en chef pourra, en toute "légitimité" mater la révolte, puisque ce sera la "volonté populaire", il fera voter et appliquer de nouvelles "lois", pour "garantir la sécurité du bon peuple". Il pourra en appeler à l'unité nationale (voir à son identité) face à nos ennemis ... de l'intérieur, et peut-être même de l'extérieur.
A moins que je divague, à moins que l'on n'ait jamais entendu ces cris d'orfraie, ni récemment ni au siècle dernier.
Je ne sais pas ce qu'il en est des autres européens, mais à partir de ce coup de force je conteste la moindre parcelle de légitimité à l'Europe d'aujourd'hui, celle qui le perpètre, celle qui "va de l'avant", contre notre décision, contre nous.
C'est précisément parce que, malgré l'omniprésente propagande, nous sommes bien conscients que l'Europe qui se construit n'est pas la notre, qu'elle est contre nous et pour une minorité de gens du beau monde, que nous avons refusé CETTE construction, par référendum.
On pourrait décider de construire, ou d'essayer de construire, une autre Europe, celle de la carte postale, celle que personne ou presque n'a rejeté lors de ces référendums.
Mais si l'Europe actuelle, l'Europe réelle, s'entête et réussit à "aller de l'avant", à l'encontre de deux référendums, alors elle se bâtira par un putsch.
Mais on pourra toujours y arborer un joli pins où il sera écrit DEMOCRATIE et lettres d'or.
Ils seront même produits dans des pays à faible coût de main d'oeuvre, en toute concurrence, et pourront librement circuler dans toute l'union.
C'est vrai quoi, il est hors de question d'entraver la libre circulation de la DEMOCRATIE !