Hadopi Hadoptée ? Et Haprès ?
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kaneda_aka_tetsuoka
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Les Américains ont tendance à faire peu de cas de cette forme culturelle. La bande dessinée est une caractéristique peu attrayante de notre culture. Nous avons peu de chance de bien comprendre les mangas, parce que nous sommes peu nombreux a avoir déjà lu quelque chose qui ressemble à ces authentiques "nouvelles graphiques". Pour les Japonais, les mangas embrassent tous les aspects de la vie sociale. Pour nous, la bande dessinée évoque des hommes en collants ridicules. Et de toute façon, ce n'est pas comme si le métro de New York était plein de lecteurs de Joyce ou même d'Hemingway. Des gens de différentes cultures se distraient de façons différentes; les Japonais de cette curieuse et intéressante façon.
Mais mon but n'est pas ici de comprendre les mangas. Il est de décrire un phénomène à propos des mangas, tout à fait étrange du point de vue d'un juriste, mais tout à fait familier analysé d'une perspective Disney.
C'est le phénomène des doujinshis. Les doujinshis sont aussi des bandes dessinées, mais une sorte de copie des mangas. La création des doujinshis obéit à des règles strictes. Une copie conforme n'est pas un doujinshi; l'artiste doit apporter une contribution à l'art qu'il copie, par des transformations légères et subtiles, ou alors plus sensibles. Un doujinshi peut ainsi utiliser une bande dessinée traditionnelle répandue, et la reprendre en changeant le scénario. Ou garder tout le caractère d'un personnage, mais changer légèrement son aspect. Il n'existe pas de formule qui définit ce qui fait qu'un doujinshi est suffisamment "différent". Mais la différence doit exister pour caractériser un vrai doujinshi. Il existe des commissions qui rejettent les vulgaires copies, et autorisent les authentiques doujinshis à participer à des expositions spécialisées.
Ces bandes dessinées inspirées par d'autres représentent une grosse part du marché des mangas. De tout le Japon, plus de 33000 groupes de créateurs réalisent ces fragments de "créativité Walt Disney". Deux foix par an, plus de 450000 Japonais se rassemblent dans de grandes manifestations pour les échanger et les vendre. Ce marché existe parallèlement au courant principal, commercial, du marché des mangas. Il est à l'évidence, d'une certaine façon, en compétition avec ce marché. Mais les personnes qui contrôlent le marché commercial des mangas n'entreprennent pas d'action soutenue pour fermer le marché des doujinshis. Il prospère, malgré la compétition et malgré la loi.
Pour les spécialistes du droit, la caractéristique la plus curieuse du marché des doujinshis est simplement qu'il lui soit permis d'exister. D'après la loi japonaise sur le copyright, qui reflète, au moins sur le papier, la loi américaine, le marché des doujinshis est illégal. Les doujinshis sont clairement des "travaux dérivés". Il n'est pas d'usage pour les créateurs de doujinshi d'obtenir la permission des auteurs de mangas. En pratique, simplement, ils utilisent et modifient les créations des autres, comme le fit Walt Disney avec Steamboat Bill, Jr. Cette appropriation, sans permission du détenteur original du copyright, est illégale d'après la loi japonaise, comme d'après la loi américaine.
Pourtant, ce marché illégal existe, et même prospère, au Japon. Beaucoup pensent même que c'est précisément à son existence que les mangas japonais doivent leur prospérité. Voici ce que me disait l'auteur américain de bandes dessinées Judd Winick: "Les premiers temps de la bande dessinée en Amérique ressemblaient à ce qui se passe au Japon aujourd'hui... Les comics américains sont nés en se copiant les uns les autres... C'est ainsi que les artistes apprennent à dessiner, pas en décalquant les comics, mais en les examinant et les copiant" et en leur empruntant5.
Les comics américains sont maintenant très différents, explique Winick, en partie à cause de la difficulté légale à les adapter, à la façon des doujinshis. Il poursuit, parlant de Superman: "il y a des règles, et il faut s'y tenir." Superman ne "peut pas" faire certaines choses. "Pour un créateur, il est frustrant de devoir respecter des limitations définies il y a cinquante ans."
L'usage, au Japon, minimise ce problème légal. Certains disent que c'est précisément l'effet heureux sur la marché des mangas japonais qui explique cet adoucissement. Par exemple Salil Mehra, professeur de droit à la Temple University, émet l'hypothèse que le marché des mangas accepte ces infractions parce qu'elles incitent le marché des mangas à être plus productif et plus riche. Tout le monde y perdrait si les doujinshis étaient interdits, ce qui explique que la loi n'interdit pas les doujinshis6.
Epohrolias a écrit:N'empêche que s'il y a une loi contre les dojins mais que personne ne la respecte (car ce serait nuisible en tout temps), pourquoi on ne l'enlève tout simplement pas? On doit garder une loi utile. On peut garder une loi inutile. Mais en aucun cas on ne doit garder une loi... nuisible.
Mais à bien y penser, est-ce que les dojins n'entreraient pas plutôt dans la catégorie parodie? Dans ce cas, ce ne serait pas illégal...
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