Forest Ent a écrit:Merci beaucoup pour toutes ces précisions, qui ont dû te demander du temps. C'est vraiment très aimable à toi.
De rien, toutes ces informations étaient disponibles sur le site de legifrance, ça ne prend donc pas beaucoup de temps pour les retrouver.
Forest Ent a écrit:Je suppose que tu vas me répondre (...)
J'en profite pour préciser en préambule que mon objectif est avant tout d'informer dans la mesure de mes connaissances et de ma disponibilité, surtout si je vois des erreurs écrites. Ainsi, lorsque je suis amené à dire quel est le droit applicable, cela ne signifie pas que je l'approuve et que je le défends. Je ne suis pas là pour dire aux autres ce qu'ils doivent penser (certains prescripteurs d'opinions s'en chargent bien ;-), d'autant que je n'ai pas nécessairement un avis tranché sur toute chose.
Seulement, comme je le suggérais à dubdub, je m'efforce de faire en sorte que chacun puisse se faire sa propre opinion en connaissance de cause.
Ceci étant dit, je te donne à présent mon avis.
Forest Ent a écrit:Je vais tenter de reformuler cela à ma manière en ré-utilisant l'exemple ultra-traditionnel des radars routiers.
Les sociétés d'assurance automobile embauchent des contrôleurs qui prêtent serment devant le tribunal local. Ils transmettent ensuite des rapports disant : "j'ai vu telle plaque tel jour à telle heure à +50 km/h, à vous de jouer". Pour établir ce "constat", ils ont pu utiliser les machines qu'ils souhaitent, et il n'existe aucune norme ou réglementation concernant ces machines. Il n'y a pas non plus de "photo" au sens analogique classique. La PJ peut soit attendre de retrouver la même plaque, soit les croire sur parole.
C'est bien ça ?
Si c'est le cas, ça me semble poser entre autres au moins le même problème de dépendance vis à vis de la fiabilité des machines que nous avions déjà discuté à propos des machines à voter, et qui se pose d'ailleurs de manière crue à propos des radars routiers. Je suppose que tu vas me répondre que les erreurs seront rares, et qu'il sera toujours possible de procéder à un complément d'enquête. Mais, premier point, l'affaire Thomas me semble montrer qu'un particulier ne peut pas répondre grand chose à une brochette "d'experts". Et, deuxième point, cela constitue à mon sens une fuite en avant vers une dépendance plus grande de la justice vers de plus en plus de privé et de machines. Au moins, les radars routiers sont eux opérés par de vrais flics.
Il y a eu un débat récent sur la fiabilité des radars routiers. Ils sont très sensibles au réglage, je crois de l'ordre de 5km/h d'erreur pour un degré d'erreur d'orientation. Pourrait-on compter sur une société privée pour reconnaitre ce genre de gags?
Oui, c'est évident que la loi délègue pour partie la constatation de ces infractions à leurs victimes, l'idée avancée étant que les forces de l'ordre n'ont ni le temps ni la technicité requise pour se focaliser sur ces délits.
Cela ne signifie pas pour autant que ces constats seraient incontestables.
Tu prends l'exemple des contrôles autoroutiers. Pour poursuivre dans ce parallèle, le constat consisterait à dire qu'à tel moment, telle IP partageait tel fichier protégé.
L'erreur ne consisterait pas en un pourcentage de vitesse mal appréciée, mais plus radicalement sur l'existence de ce partage. L'erreur serait de prétendre à tort que tu as partagé telle liste de fichiers alors que cela n'est pas vrai.
Rapportée à ton exemple, cela reviendrait à t'accuser d'avoir tel jour au volant de tel véhicule commis tel excès de vitesse, alors qu'en réalité ce n'est pas ton véhicule.
La défense consisterait alors à répondre que l'on n'a jamais eu ce fichier, et que dès lors on n'a encore moins pu le partager. En cas de doutes, un examen de l'ordinateur du prévenu permettrait de démontrer son absence (ce qui répond à l'hypothèse d'un piratage de sa connexion wifi). Si le fichier n'est pas retrouvé et que la partie civile prétend qu'il aurait été effacé par le prévenu, c'est à elle de le démontrer, à ses frais. En cas d'échec, le doute profite au prévenu.
Allons plus loin en corsant l'exemple. Imaginons que tu détiennes bien sur ton ordinateur les fichiers relevés dans le constat (et ce légalement bien sûr), mais que tu ne les as pas partagé. Statistiquement ce doit être rare, mais pourquoi pas. Les vraisemblances jouent contre toi. Mais il suffirait de demander une comparaison entre les fichiers présents sur ton ordinateur et ceux prétendument partagés.
Si effectivement tu dis vrai, il ressortira nécessairement une différence entres ces fichiers (de poids, de nom, de tags, etc), permettant de remettre en cause le constat.
Pire, si l'agent assermenté n'a pas téléchargé les fichiers litigieux pour alimenter son constat, mais s'est contenté de se fier aux noms de fichiers, c'est sa méthodologie qui peut être contestée, surtout si des activistes en jouent comme je le suggérais plus haut en proposant des pots de miels pour leurrer les contrôleurs et discréditer leur méthodologie.
Cela fait beaucoup de si, et j'en arrête donc là, comme je te le disais les raisonnements dans l'absolu touchent vite leurs limites, on ne peut valablement en discuter que sur pièces réelles.
Je n'ai pas de raisons particulières de penser que la Sacem ira inventer des cas de téléchargements fictifs, je pense qu'il y a suffisamment à faire avec les vrais pour qu'il ne soit pas besoin d'en créer de toute pièce, en risquant de jeter le discrédit sur ses constats avérés.
Je n'ai pas non plus de raisons particulières de penser que les juges et les avocats ne feront pas leur travail, comme ils l'ont fait avec les constats d'huissiers sur Internet, et alors même que leur serment et la valeur probatoire de leurs constats est autrement plus forte.
Ainsi, la jurisprudence subordonne leur valeur probante à des conditions rigoureuses telles que le fait que l'huissier ait vidé la mémoire cache et les cookies de l’ordinateur ayant servi à établir le constat, que le premier contenu visité soit le contenu à constater, que la connexion internet soit dépourvue de tout proxy pouvant fausser les résultats,
etc. Lorsque des affaires basées sur ces constats des agents assermentés de la Sacem se présenteront, ces questions se poseront.
Mikelenain a écrit:effectivement, je me suis trompé de sens .... hummm ... je dois confondre avec un autre mot proche ^^ (un truc du genre "instructions" ou "directives" )
Il n'y a pas de mal, à présent c'est plus clair.
edit : typo