Sur la page de http://www.zdnet.fr/actualites/business/0,39020715,39186990,00.htm l'ensemble des auteurs a écrit:Eric Bignand, "M. Secteur public" chez Microsoft France: «Le phénomène du libre est plus limité qu'on ne le pense»Interview - La croisade du géant de Redmond contre les logiciels libres vise aussi les administrations. En France, Microsoft vient ainsi de créer une division "secteur public". À sa tête, Eric Bignan, un transfuge d'IBM chargé de séduire les organismes publics.
Microsoft surveille – en France comme ailleurs – l'intérêt grandissant que le secteur public porte aux logiciels libres et, plus généralement, au modèle du code source ouvert. Pour séduire les administrations et «reconquérir du terrain» dans l'Hexagone, la multinationale a donc créé au sein de sa filiale, le 1er novembre dernier, une unité d'affaires "Secteur public" (d'autres grands pays en sont déjà pourvus). Une équipe de près d'une centaine de personnes va donc tout mettre en œuvre pour aider Microsoft «à se rapprocher davantage du secteur public», comme le dit pudiquement la société. L'objectif est de répondre aux besoins spécifiques des ministères, collectivités locales, établissements scolaires, centres de recherche ou autres organismes financés par le contribuable.
Pour diriger cette division, Microsoft a débauché Eric Bignand, 42 ans, un ancien d'IBM. Entré en 1987, il a passé 17 ans dans les différents services d'IBM France et Europe. À partir de 1999, il y a assuré les fonctions de "Monsieur gouvernement et administration" au niveau européen. En 2002, il a dirigé la division secteur public d'IBM pour la France, la Belgique et le Luxembourg.
ZDNet: Comment allez-vous mieux convaincre le secteur public d'opter pour les produits Microsoft à l'heure où la tentation est grande d'opter pour les logiciels libres, grâce à des arguments tels que l'accès au code, le faible coût et l'adaptabilité ?Eric Bignand: La concurrence est saine. Pour autant, le phénomène du libre est plus limité qu'on ne le pense. La dépense du secteur public pour ce type de solution est ainsi inférieure à 1%. Les engagements de Microsoft pour le secteur public sont très clairs. Sur l'ouverture, le programme GSP (Government Security Program – contrat permettant d'accéder au code sous certaines conditions, Ndlr) permet aux gouvernements d'obtenir le code source [de nos logiciels Windows et Office]. Déjà soixante États y participent. Sur le coût, toutes les études sur le sujet indiquent que le coût de possession globale de solutions libres est très en faveur de Microsoft avec des ratios de deux à huit. Quant à l'adaptabilité, nous sommes en discussion avec l'Adae (Agence pour le développement de l’administration électronique, créée en février 2003 par le gouvernement, Ndlr) pour mettre à disposition du secteur public des produits adaptés à ses besoins autour de Microsoft Office.
Vous mentionnez le programme GSP, mais le gouvernement français ne refuse-t-il pas, justement, d'y participer? Pourquoi n'est il pas réceptif à ce dispositif ?Effectivement, la France ne fait pas partie des pays intégrant le programme GSP, pour des raisons qui lui sont propres. Nous n’avons probablement pas suffisamment expliqué les enjeux de transparence et de sécurité que cette proposition contient. L'accès au code source de Windows et Office est toujours une proposition ouverte de Microsoft au gouvernement français.
Pensez-vous qu'une cohabitation soit possible entre logiciels libres et propriétaires au sein du secteur public?
Nous ne nous inscrivons pas dans une farouche opposition au libre, qui effectivement peut cohabiter avec le modèle "éditeur". Bill Gates, récemment en visite à Paris, a été clair sur ce sujet. Il a indiqué que le libre était une réponse, ce qui est un changement radical de position. Mais il ne s'agit pas de la seule.
Qu'est-ce que le projet Solution Sharing Network (SSN)? N'est-il pas directement inspiré du libre ?Le principe de SSN est en effet proche des développements collaboratifs du libre. Cette solution sera mise à disposition gratuitement du secteur public d'ici à la fin de l'année. Il s'agit d'un réseau de partage de solutions. Ainsi, imaginons qu'une collectivité développe un module de formulaire à partir de nos produits; eh bien elle pourra en faire profiter, via SSN, d'autres services administratifs. Favorisant une meilleure mutualisation de la recherche et des développements, ce service permet d’accroître l’efficacité opérationnelle et de réduire les coûts liés aux projets "e-administration". Il est financé par Microsoft.
Pourquoi Microsoft France ne possédait pas jusqu'alors de division "secteur public"? Quelles en sont les ressources ?Les divisions secteur public se développent les unes après les autres dans tous les pays depuis un peu moins de deux ans. Auparavant, cette activité était intégrée à la division "grands comptes". Le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne en disposent déjà en Europe. Même chose aux États-Unis, en Chine, en Inde ou au Japon. Il y a eu une prise de conscience sur le fait qu'il fallait répondre de manière singulière aux attentes de ce secteur. Depuis huit mois, il y a eu de nombreuses embauches; la division, créée le 1er novembre, rassemble une cinquantaine de collaborateurs directs et cinquante autres mis à contribution dans d'autres services.
Pour en savoir plus :
Logiciels libres: les collectivités ont besoin d’applications métiersChristophe Guillemin, ZDNet France
Logiciels libres: les collectivités ont besoin d’applications métiersPar Thierry Noisette ZDNet France Mardi 13 juillet 2004
Reportage - Le recours aux logiciels open source est une source d’économie et plus largement de «reconquête des biens communs», affirment les collectivités membres de l’Adullact, qui était présente aux cinquièmes Rencontres du logiciel libre à Bordeaux.
La cinquième édition des Rencontres mondiales du logiciel libre (RMLL), qui se sont déroulées du 6 au 10 juillet à l’Enseirb (Bordeaux), a été l’occasion de faire le point sur l’activité de l'Association des développeurs et des utilisateurs de logiciels libres pour les administrations et les collectivités territoriales (Adullact), deux ans après sa création.
Pour François Elie, son président, l’association doit mettre l’accent sur trois thématiques. D'abord la promotion des formats ouverts. «Des éditeurs de logiciels libres travaillent avec nous pour des échanges sur les schémas XML», affirme-t-il. «La réaction des éditeurs traditionnels, prestataires des collectivités, a d’abord été de nous considérer comme des clowns, puis des gêneurs. À présent, ils dialoguent avec nous, et ont tous conscience que le modèle éditeur va mourir même s’ils ne savent pas quand. Comme notre intérêt n’est pas du tout la disparition des éditeurs, nous travaillons ensemble à des évolutions, comme sur les formats et l’interopérabilité», poursuit-il.
Deuxième action, la «reconquête de biens communs» que sont les données publiques: «Beaucoup de données existent, créées et collectées avec l’argent public, pour lesquelles les collectivités doivent encore payer ensuite, ce qui pose problème. D’où l’intérêt d’applications libres comme en cartographie, telles que "Un point c’est tout" qui peut servir autant aux enseignants qu'aux collectivités.»
Chacun développe dans son coin
Enfin, un élargissement de l’association à l’administration publique hospitalière, où le développement du recours au logiciel libre «va très vite». L’Adullact est également partenaire de l’Adae (Agence pour le développement de l’administration électronique) pour différents chantiers, dont le lancement récemment annoncé de Spip Agora avec le Service d’information du gouvernement (SIG).
Autre point critique soulevé par l’association: le manque de logiciels métier sur SourceForge, le plus important site de téléchargements de logiciels libres (qui de surcroît «n’est paradoxalement pas libre, est en anglais et n’est pas hébergé en France»). «Ce sont des applications métiers que les collectivités ont besoin pour la gestion de cimetières, des parcmètres, etc. Or on s’aperçoit que chacun en développe dans son coin: partageons nos étagères!» insiste François Elie. L’Adullact collabore à GForge, version libre de SourceForge en France et en français. Parmi les applications qu’elle propose en ligne, Local Trust PME, une solution de dématérialisation des procédures de marchés publics, est la plus téléchargée avec Spip Agora.
Dans le registre des bonnes pratiques, le président de l’Adullact cite la démarche de la mairie de Lyon, qui a développé un portail internet et intranet, et s’apprête à le donner à tous sous licence libre. De son côté, la Ville de Paris a développé le logiciel de création de portails Lutèce, «le Spip des villes», qui sera proposé sur GForge à la rentrée prochaine.