Propriété intellectuelle et contestation du brevet

[abdul007]

Est-ce que vous pouvez me donner un conseil concernant cet affaire ?

Dans le cadre d’un stage de 18 mois dans un centre de recherche industrielle, j’ai effectué un travail de recherche innovant. J’ai terminé ce contrat depuis 24 mois. Récemment, j’ai constaté que ce centre a déposé une demande de brevet sur le travail de recherche que j’ai réalisé pendant mon stage sans mentionner mon nom en tant qu’inventeur.

Parmi les closes définis dans mon contrat :
«… ; vous vous engager, dans le cas où vous seriez amené pendant votre séjour, à réaliser ou à participer à une ou des innovations entrant dans le domaine d’activité de recherche dans notre centre, à renoncer au profit de notre centre à tous droits de propriété industrielle se rattachant auxdites inventions. Notre centre pourra en conséquence, déposer en son nom des demandes de brevets couvrant cette invention, dans tous les pays du monde, on y mentionnant votre nom. Vous vous engagez en outre par la présente accorder à notre centre toute assistance en votre pouvoir pour la mise au point de ladite demande de brevet et la conduite de la procédure afférente, dans les pays à entente préalable »

Dans la mesure où ce centre n’a pas respecté ses engagements envers moi :
1- est ce que je peux contester ce brevet ?
2- est ce que je peux récupérer un pourcentage de la propriété industrielle ?
3- ce conflit peut-il conduire à l’annulation de toutes closes cités dans le contrat et par la suite me libérer de mes engagements envers ce centre ?

je vous remercie d'avance

[dedenimes]

Bonsoir abdul007, quel est le rapport avec le libre dans tout ceci ?

[demonlight]

Bonjour,

Je pense qu'un juriste serait plus à même de répondre à cette question...

Eventuellement, en cherchant un peu dans Google, tu aurais pu aller sur le site de l'INPI où il est possible d'envoyer des questions par mail...

Mais bon...

J.

[leto_2]

bonjour abdul007,

j'ai repensé à ton message en lisant un arrêt récent de la Cour de cassation qui m'a paru proche :

arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, du 25 avril 2006

L'histoire :

un stagiaire au CNRS invente une technique d'examen ophtalmologique, dans un laboratoire dépendant dudit CNRS.
Le CNRS revendique la propriété du brevet.

La Cour d'appel de Paris dans son arrêt du 10 septembre 2004 fait droit à cette revendication.

Elle estime que le stagiaire "a concouru à la réalisation de l'invention alors qu'il était stagiaire en formation au sein d'un laboratoire du CNRS, établissement public national à caractère scientifique et technologique chargé d'assurer une mission de service public, qu'il est usager de ce service public, et comme tel soumis au règlement intérieur édicté par le chef de service, [...] que ce règlement, qui est par conséquent applicable à M. X..., qui l'a signé, dispose que "dans le cas où les travaux poursuivis permettraient la mise au point de procédés de fabrication ou techniques susceptibles d'être brevetés, les brevets, connaissances ou développements informatiques seront la propriété du CNRS", qu'à la différence des droits patrimoniaux que les dispositions décrétales prévoient au bénéfice des agents publics, il est légitime que les étudiants qui ont participé à une invention ne participent pas à ses fruits pécuniaires, que M. X... bénéficie d'un enseignement à l'Université ainsi qu'au laboratoire, des installations de ce laboratoire et du travail de l'ensemble des personnels techniques, qu'il bénéficiera en outre d'un titre universitaire et de l'inscription de son nom sur le brevet auquel il a participé, et que, quand bien même il n'aurait signé ce règlement que postérieurement à la réalisation de son invention, il s'agit d'un règlement de service qui s'impose à lui comme usager du laboratoire".

Donc elle admettait la propriété du CNRS sur le brevet.

Mais, cet arrêt a été cassé par la Cour de cassation :

"Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que M. X... n'était ni salarié du CNRS, ni agent public, ce dont il résultait que la propriété de son invention ne relevait d'aucune des exceptions limitativement prévues par la loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés"

Explication : n'étant ni salarié ni agent public, il ne rentrait pas dans les exceptions légales qui attribuent la propriété de l'invention à son employeur. Dès lors, il reste le propriétaire de son invention.
De l'avantage d'être stagiaire...

[ben_san]

Un arrêt qui a fait un beau tollé au sein des EPST comme le CNRS ou l'INRIA...
De ce que je me rappelle de l'arrêt, il s'agissait principalement de dissocier le statut de stagiaire de celui de salariés (et ainsi, la cession automatique à l'employeur).
C'est pourquoi les conventions de stage comportent systématiquement des clauses de PI (sur les logiciels aussi, ce qui pourrait être plus contestable). Or ces conventions sont tout à fait légales, et les stagiaires y sont tenus.

Dans le cas de abdul007 (en fait, je lui avais répondu en MP à l'époque, mais n'ai jamais eu de retour), il s'agit plutôt d'une inexécution contractuelle (la paternité étant de plus un « droit moral de l'inventeur »), aux conséquences plutôt réduites, je pense (être réintégré, en sa qualité d'inventeur, je suppose).

[leto_2]

Tu peux voir si ton MP a au moins été lu.

Sur les clauses de propriété intellectuelle dont tu parles, s'agit-il de clauses prévoyant que les découvertes que le stagiaire est amené à faire seront cédées de plein droit à leur service de rattachement ?

[ben_san]

Uhm... Si c'est dans ' envoyé ', c'est que c'est reçu ? Dans ce cas, ça l'est

Je n'ai plus les clauses en tête, mais c'est écrit de manière à englober toute la Propriété Industrielle, ainsi que le droit des Logiciels — systématiquement en cession de plein droit, avec la précision de la mention de l'inventeur/auteur en tant que tel. En fait, c'est même parfois tellement vaste que ça englobe même des créations non soumises à un droit de PI...

En parlant de ça, et en revenant sur du Libre , est-ce que tu (ou toute autre personne) saurais où trouver des contrats de travail, voire de stage, aménagés de façon à tenir compte des licences libres (notamment du point de vue de l'attribution à l'employeur) ? (tant que l'on y est, je bosse aussi sur des contrats types d'Édition qui permettront de tenir compte des licences libres )

[leto_2]

ok, je demandais, car justement les clauses de cession future de droits sont prohibées par principe me semble-t-il.

Pour des modèles de contrat, qu'entends-tu par "de façon à tenir compte des licences libres" ?

[ben_san]

En droit d'auteur, pas de cession globale d'oeuvre future ; mais en matière de brevets, rien de cela justement.
Enfin, je dis ça, mais je n'ai en ce moment pas grand-chose sur quoi bosser (même pas un code...), hormis internet, et il faudrait sans doute vérifier.

Pour le contrat d'édition, je ne sais pas, une piste que l'on est en train de fouiller, ou l'enjeu serait de définir des Ctr qui ne seraient pas basés sur une cession exclusive de Droit d'Auteur, et qui intégreraient la licence de l'oeuvre en son sein

Pour les contrats de travail, c'est plus perso, et c'est moins complexe. J'aimerai par exemple bosser sur ceux au sein des SS2L, qui sont basés sur ceux des SSII sans tenir compte des spécificités des développeurs de LL (ni même forcément des licences utilisées au sein de l'entreprise).

Le tout à suivre...

D'ailleurs, s'il s'avérait que tu avais du temps à passer... :siffle: