Interview de Christian Paul dans le Nouvel Obs:
Quelles sont les dernières évolutions quant au projet de loi et à la licence globale? Qu'est ce qui va changer si elle est retirée?
- Ce qui est certain, c'est qu'aujourd'hui il est indispensable d'élaborer une loi qui permette le financement de la musique sur Internet. Un tel projet était défini dans la licence globale. Il s'agissait de rémunérer les artistes et tous ceux qui travaillent dans l'industrie du disque par une taxe que les internautes paieraient en plus sur la facture de leur fournisseur d'accès.
En retirant l'article sur la licence globale, le but de l'UMP était de toute façon de faire passer son projet en invitant en masse ses députés, qui souvent ne connaissent même pas le dossier, à voter pour en respectant une consigne de vote.
Nous avons réussi à prouver que retirer un article sans consultation de l'assemblée constituait une faute constitutionnelle. Le ministre de la Culture a donc été forcé de réintroduire cet article. Seulement, un tel revirement de position du gouvernement illustre bien sa volonté de revenir en arrière par rapport à l'amendement supprimant l'article sur la licence globale et introduisant des amendes.
Cette nouvelle disposition ne permet aucunement la rémunération des artistes, puisque l'argent ainsi récolté va directement dans les caisses de l'Etat. De toute façon à l'heure actuelle, il n'existe aucune autre proposition pour rémunérer les artistes dont les œuvres sont diffusées sur Internet.
Renaud Donnedieu de Vabres ne sort-il pas décrédibilisé de ce cafouillage politique?
- Je ne pense pas qu'il faille faire porter le chapeau au seul ministre de la Culture. C'est tout le gouvernement qui selon moi est responsable de ce cafouillage, depuis les interventions de Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy sur ce sujet. Alors que le parlement pouvait écrire une loi cohérente et constructive, ils ont voulu imposer leur touche personnelle. C'est essentiellement pour cette raison que le gouvernement s'est pris les pieds dans le tapis.
La balle est désormais dans son camp, puisque pour faire avancer la réflexion, nous avons demandé deux choses à l'issue des débats à l'Assemblée: nous demandons au gouvernement de mettre fin à l'urgence dans laquelle est traité ce dossier, et de reporter l'examen du projet de loi à l'assemblée afin que les députés puissent prendre le temps de le lire pour pouvoir en voter en connaissance de cause.
Sans la licence globale, la gratuité de l'accès à la musique ne vous semble-t-elle pas déprécier le travail des artistes?
- Il est évident que ce texte en l'état actuel des choses nous enfonce dans la gratuité de la musique, ce qui n'est pas très reconnaissant pour le travail des artistes. Comme je l'ai déjà dit, la perspective de sanctionner systématiquement la copie privée ne permettra pas aux artistes de toucher davantage d'argent. Il faut également légiférer sur les plates-formes de vente, quitte à les soutenir financièrement, et établir un cadre pour l'application des lois de la concurrence.
Il n'est pas normal que les internautes soient bloqués par le verrouillage des pistes par des extensions DRM qui leur impose l'achat de tel ou tel appareil numérique pour pouvoir les entendre.
Il faut créer un espace d'échange non lucratif de la musique sur Internet. Le but est d'arriver à créer un Internet équitable, qui permette aux artistes d'avoir la reconnaissance de leur travail par une rémunération régulière, qui pourrait être mis en place au travers d'une mesure comme la licence globale, et aux internautes d'avoir un accès totalement libre à leurs œuvres. Le projet actuel du gouvernement, c'est de créer un Internet prédateur, aussi bien des artistes qui ne touchent quasiment rien sur les ventes de titres sur Internet (pour une chanson achetée 0,99€, l'artiste touche 0,06€ et le musicien qui l'accompagne rien du tout) que les internautes qui, considérés comme des fraudeurs, seront contraints de payer des amendes qui rempliront les caisses de l'Etat.
Propos recueillis par Pierre Mazaré
(Le jeudi 9 mars 2006)
Si l'on suit ces propos l'État empocherait et même les majors seraient "perdants" ?
Prévenez-moi si je me trompe.
ps: Je n'ai pas vu mon chat depuis quatre jours, je suis inconsolable.