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Page 2 sur 3Précédent 1, 2, 3 SuivantDe la nocivité de la clause NC des Creative Commons

Quand l'esprit du libre pénètre le domaine culturel...

Dim 09 Oct, 2005 13:50

Sebastien a écrit:Car même si tout ce que tu dis là est vrai, il n'en reste pas moins que, pendant ce temps là, l'œuvre n'est aucunement modifiée : tout ce qui sera dit ou pensé de l'œuvre n'en fera pas plus partie que le numéro ISBN par exemple, qui y sera collé sur chaque livre.


Certes, l'oeuvre originale n'est pas factuellement modifiée (pas plus d'ailleurs que quand on réalise une oeuvre dérivée), mais ça ne sauve pas l'argument affectif : "je ne veux pas qu'on touche à mon moi intérieur".

(et là encore, l'analyse de film permettra de dire s'il a mal compris le montage pas exemple et de pointer les contresens).


Cela suppose qu'il existe une analyse purement "objective" et impartiale, capable de voir en pleine lumière les subjectivités des autres analyses, et qui nous est accessible...
Bien sûr la compréhension évolue et souvent progresse (notamment dans le temps historique), mais à aucun moment l'oeuvre ne reste intacte dans son contact avec le public.
AntoineP

Messages : 1038

Dim 09 Oct, 2005 15:46

Bonjour,

je crois qu'il est tant de ressortir la bonne vieille théorie de l'Art pour l'Art qui a permi aux artistes de se défendre contre la censure et de devenir indépendants du pouvoir.

C'est simple : l'Art est inutile.

Qu'il soit dans n'importe quelle license, ça ne change rien, il est inutile. Vous pouvez vivre sans art, beaucoup plus facilement que sans traitement de texte ou navigateur web. Contrairement à la technologie et à la recherche scientifique, l'art n'a rien à voir avec les brevets, vous n'aurez jamais à acheter une oeuvre d'art que vous ne voulez pas.

Il y a un nombre ridiculement élevé d'oeuvres d'art dans le monde, et chacune est différente des autres. Il n'y a pas de trinité dans le genre de : Microsoft vs Apple vs Linux. Il y a des corporations, oui, mais rien ne vous empêche d'acheter toutes vos oeuvres d'art à des artistes indépendants qui gagnerait plus d'argent en étant concierge.

L'Art est une entreprise essentiellement individuelle et égocentrique, les projets collectifs sont des fragments de travail individuel (pensez à ces romans collectifs que personne ne lit...) (ou à un recueil de nouvelles).

Lorsqu'il y a édition de l'art, peut importe le médium, il doit y avoir collaboration. La volonté initiale de l'artiste doit être respectée pour que l'oeuvre ne se transforme pas en une autre oeuvre distincte. Pour cela, il doit y avoir discussion sur l'oeuvre d'art, car il est impossible d'être objectif dans l'«optimisation» d'une oeuvre, contrairement aux logiciels.
Donc négociation, et pour qu'il y ait négociation, on ne doit pas s'enfermer dans le moule d'un contrat universel, peut importe quels sont ses idéaux.

Un projet artistique de la dimension de Mozilla ou OpenOffice serait condamné à être une montagne de fragments individuels plus ou moins liés ensembles.

Ce qui sépare l'oeuvre d'art de l'information, de l'informatique ou de la science, c'est le style, l'esthétique. Grâce à lui, il est possible d'écrire cent fois la même chose de façons différentes (pensez aux Exercices de style de Queneau). La propriété intellectuelle ne s'applique qu'à l'oeuvre globale, il suffit de changer le style, les noms des personnages et quelques détails pour créer une nouvelle oeuvre littéraire. Pour la peinture, c'est la même chose, il est possible de faire des peintures dans le style de Pollock sans se faire poursuivre, car elles ne seront jamais identiques aux originales.

La question des licences en est surtout une de diffusion pour l'art. L'oeuvre d'art est un travail individuel, pour l'édition, il doit y avoir discussion. Vous remarquerez que les licences « libres libres » seront plus utilisées par des gens qui font de l'art comme loisir ou travail secondaire pour obtenir une diffusion plus large, comme ils n'ont rien à perdre. Ceux qui en font leur métier n'abandonneront jamais leur salaire, à moins que vous soyez prêt à abandonner le vôtre...

Dans le cas de la littérature, les écrivains de talent ne seront jamais au rendez-vous du libre, car ils doivent consacrer une partie importante de leur vie à l'art, personne ne va terminer votre roman si vous arrêter à la moitié. Et si il y a une chose que fuient comme la peste les véritables écrivains (je veux dire ceux qui ne sont pas des fabricants de best seller préconstruits), c'est bien l'idéologie, peut importe si elle est positive ou négative...
marcphoenicis

Messages : 2

Dim 09 Oct, 2005 16:56

mais ça ne sauve pas l'argument affectif : "je ne veux pas qu'on touche à mon moi intérieur".

mais qu'est-ce qui te gène tant là dedans antoine ?
c'est dingue ça...
c'est l'affectif ? ça t'embête ça l'affectif ? l'amour de soi ? c'est mal ?
dana

Messages : 251
Géo : uzbekistan

Dim 09 Oct, 2005 19:03

frenchy a écrit:Vu l'évolution de la page d'accueil de Framasoft je me demande parfois si l'avenir de l'annuaire des logicieils libres ne se trouve pas dans la wikipedia ...
http://fr.wikipedia.org/wiki/Portail:Logiciels_libres

ouais ! cool ! génial ...
j'avais pas encore vu !

je pense que c'est une alternative séduisante :D
HP

Messages : 140

Dim 09 Oct, 2005 20:17

dana a écrit:mais qu'est-ce qui te gène tant là dedans antoine ?
c'est dingue ça...
c'est l'affectif ? ça t'embête ça l'affectif ? l'amour de soi ? c'est mal ?


L'amour de soi ne me gêne pas, chacun fait ce qu'il lui plaît, mais ce que je trouve incongru c'est de penser que "donner son moi" aux autres (comme l'entendait la posteuse à l'origine) peut ne pas aller à l'encontre d'une volonté de protection de ce "moi"....

Si on considère qu'il y a des choses terriblement sensibles et douloureuses dans une oeuvre, et qu'on n'est pas prêt à voir ces choses déformées par d'autres, alors il vaut mieux tout simplement les garder pour soi (ou attendre un moment propice, voire inscrire la publication posthume dans son testament, etc.).

(cela n'empêche pas non plus le recours au droit moral au cas par cas, mais il faut bien être conscient que donner une oeuvre à voir aux autres, c'est en perdre le contrôle. Un contrat juridique même super bétonné ne peut rien contre ça.)
AntoineP

Messages : 1038

Dim 09 Oct, 2005 20:37

Il n'y a pas de trinité dans le genre de : Microsoft vs Apple vs Linux.


Trinité fantasmée... Va voir sur Sourceforge, Freshmeat ou Tucows, je me demande bien où est la dite trinité parmi les centaines de milliers de logiciels disponibles sur Internet.

Pour cela, il doit y avoir discussion sur l'oeuvre d'art, car il est impossible d'être objectif dans l'«optimisation» d'une oeuvre, contrairement aux logiciels.


Quand je lis ce genre de chose, je me dis que le posteur ne connaît pas grand'chose à l'écriture de logiciels. Les décisions y sont forcément teintées de la démarche, des desseins et de l'éthique de la personne qui prend ces décisions, elles n'ont rien d'objectif. Le terme "optimisation" lui-même est trompeur, car il ne veut rien dire sans la donnée d'une métrique particulière à optimiser : donnée qui, bien sûr, implique un choix et n'est en rien "objective".

Il faudrait arrêter de croire qu'il y a une façon objective, mathématique, d'écrire du logiciel. C'est un fantasme (encore un).

La propriété intellectuelle ne s'applique qu'à l'oeuvre globale, il suffit de changer le style, les noms des personnages et quelques détails pour créer une nouvelle oeuvre littéraire.


C'est une vision fausse de la "propriété intellectuelle". On peut être condamné pour plagiat en reprenant des portions substantielles d'une oeuvre, même si ces portions ont fait l'objet de modifications (maquillage). De même on peut être condamné pour incorporation de samples d'un morceau protégé, même si les samples ont été déformés.

De fait, on peut malheureusement être poursuivi et condamné pour beaucoup de choses.

Ceux qui en font leur métier n'abandonneront jamais leur salaire, à moins que vous soyez prêt à abandonner le vôtre...


Tu sais, une bonne partie de gens disent la même chose du logiciel libre.

personne ne va terminer votre roman si vous arrêter à la moitié.


Encore une fois, on peut dire la même chose du logiciel. Si je m'arrête à la moitié, personne ne va terminer mon logiciel de la façon dont je l'entendais. Quelqu'un viendra peut-être (et j'insiste sur le peut-être) le "compléter" mais ce sera une autre oeuvre que celle que j'aurai escomptée.
AntoineP

Messages : 1038

Lun 10 Oct, 2005 12:34

L'amour de soi ne me gêne pas, chacun fait ce qu'il lui plaît, mais ce que je trouve incongru c'est de penser que "donner son moi" aux autres (comme l'entendait la posteuse à l'origine) peut ne pas aller à l'encontre d'une volonté de protection de ce "moi"....

Si on considère qu'il y a des choses terriblement sensibles et douloureuses dans une oeuvre, et qu'on n'est pas prêt à voir ces choses déformées par d'autres, alors il vaut mieux tout simplement les garder pour soi (ou attendre un moment propice, voire inscrire la publication posthume dans son testament, etc.).


oui, ce que tu dis a une certaine logique.
Mais, c'est le propre de l'art d'exhiber quelque chose de soi, ou émanant de soi, ou créé par un sujet, il y a là, sous le couvert des règles de l'art, de l'impudeur c'est évident, une brutalité.
Il y a une chanson (magnifique) de Léonard Cohen, famous blue raincoat (une de mes chansons préférées de tous les temps) où il écrit à la fin :
"signed Léonard Cohen"
Est-ce que cette signature est un acte de propriété ? Non, évidemment.

Le problème pour l'artiste dans sa relation à l'oeuvre, j'ai envie de dire sa relation la plus intime, en tant que l'oeuvre est son bébé en quelque sorte - et pourquoi pas filer la métaphore de la maternité ici ? - n'est pas une question juridique : cette question là ne se pose qu'une fois l'oeuvre divulguée dans le monde.
(et j'en profite pour rappeler ce que j'ai déjà dit dans mon essai sur la dissémination de la musique -que cette relation juridique est pensée par le droit comme relation de paternité - le droit des oeuvres, leur commerce et leur diffusion c'est -symboliquement - le travail des pères, la création, els processus secrets et irréductibles à tout discours qui sont en amont de l'oeuvre, voilà l'affaire des mères)

Cette décision d'articuler juridiquement le rapport de l'auteur (on de devrait pas parler d'artiste ici) à l'oeuvre sous le mode de la paternité et de la propriété, est le choix fait au XVIIIème siècle par les fondateurs du droit d'auteur en France. Ils avaeint de bonnes raisons our cela (relisez le Diderot de la Lettre sur le commerce de la librairie, 1767). Les écrivains vivaient alors dans des conditions désastreuses, tandisque les libraires s'enrichissaient sur leur dos. Ceux qui choisissent une clause NC ne font rien d'autre que refuser qu'on s'enrichisse sur leur dos.

Certes, le droit d'auteur aurait pu faire le choix d'une fondation différente : les débats à ce sujet furent serrés jusqu'à la fin du XIXème siècle.
Il n'empêche, nous vivons en tant que créateurs sous la modalité de la paternité et de la propriété. Et les licences libres sont articulées à ce droit.

Toutefois, et c'est là où je veux en venir, l'expérience de la création (je parle ici bien avant la divulgation éventuelle d'une oeuvre), ne peut être pensée sous ce mode de la paternité/propriété. Elle est intime, personnelle, comme on voudra, et même si elle se déploie tout de même dans une certaine mesure dans la conscience qu'on aurait de l'existence d'un monde des oeuvres (sauf peut-être dans le cas limite de l'artiste brut), il s'y joue autre chose. C'est ce que veut dire la signature de Léonard Cohen : cete histoire est la miene. Je vous la raconte parce que j'avais besoin de le faire, de régler des problèmes personnels avec cette chanson, et peut-être vous y trouverez matière à penser à vos propres problèmes, peut-être, qu'importe au fond.
Ce n'est pas là une prétention à la propriété : c'est l'affirmation d'un SUJET.

Alors à moins de réduire tout sujet à n'être que propriétéaire ou consommateur (ce qui arrangerait bien certains décisionnaires économiques), on est bien forcé de reconnaître qi'il existe une part de nous-mêmes qui échappe tout à fait à ces logiques de la prorpriété et de la paternité au sens juridique.

C'est à cette prétention que notre ami ayant suscité ce post faisait référence je crois, c'est à cette prétention que je fais référence en publiant certaines de mes chansons sous licence CC NC ND.

Le droit ne parle pas - et heureusement - de la création, mais du commerce des oeuvres (commerce entendu au sens le plus large), c'est-à-dire de la manière dont elles sont disséminées dans uen société donnée.

Ne demandons pas au droit (fut-il énoncé sous la forme d'une licence libre ou pas) de dire ce qui se joue en amont de l'oeuvre, de se déterminer sur ce que devrait être un artiste. Le droit s'occupe des auteurs (c'est-à-dire des pères au sens de celui qui a -de droit- la paternité sur une oeuvre, ou des ayants droits), pas de création artistique.
dana

Messages : 251
Géo : uzbekistan

Mar 11 Oct, 2005 16:02

Je ne vois pas beaucoup de choix à l'extérieur de Microsoft vs Apple vs Linux, à part des systèmes d'exploitations marginaux à la compatibilité douteuse.

L'art est différent de l'informatique, car l'optimisation d'un logiciel passe par des critières assez objectifs : comme rapidité, stabilité, compatibilité, traduction. Sinon ça ferait longtemps que les développeurs de Mozilla se seraient entretués. On peut comparer les performances de plusieurs logiciels de façon relativement objective (par exemple, en faisant des tests de vitesse/compatibilité pour mesurer IE, Firefox et Opera). Essayez de faire des tests comparatifs avec des oeuvres d'art, il n'y a plus aucune crédibilité...

Pour ce qui est des poursuites, il suffit de modifier la source de façon intelligente, sinon ça ferait longtemps que The Residents se seraient fait poursuivre pour avoir fait des remix Nazi de Hey Jude et d'une vingtaine d'autres hits des années 60...

Ou The Avalanches, qui ont construit un album basé sur 800 samples sans essuyer une seule poursuite, malgré leur succès international et sans qu'ils aient versés des droits.
marcphoenicis

Messages : 2

Mar 11 Oct, 2005 16:58

marcphoenicis a écrit:Je ne vois pas beaucoup de choix à l'extérieur de Microsoft vs Apple vs Linux, à part des systèmes d'exploitations marginaux à la compatibilité douteuse.


Je ne vois toujours pas le rapport avec la choucroute. La plupart des logiciels, de facto, ne sont ni Windows, ni Apple, ni Linux (même s'ils tournent sous l'un de ces systèmes). Il te faut un cerveau d'appoint pour comprendre ?

L'art est différent de l'informatique, car l'optimisation d'un logiciel passe par des critières assez objectifs : comme rapidité, stabilité, compatibilité, traduction.


L'"optimisation" représente une partie dérisoire de l'écriture d'un logiciel.
La prochaine fois, prends la peine de lire le message auquel tu réponds.

Sinon ça ferait longtemps que les développeurs de Mozilla se seraient entretués.


Et tu crois que les développeurs ne se disputent jamais ? T'es déjà allé sur une liste de discussion dédiée à un logiciel avant de venir sortir de telles conneries ? Sur la liste du noyau Linux, les gens s'entretuent parfois à tel point que si je te traite, à juste titre, de brave neuneu, je suis largement en-dessous de ce qui se pratique là-bas.

Pour ce qui est des poursuites, il suffit de modifier la source de façon intelligente


Parce que tous ceux qui se sont fait condamner pour utilisation de samples l'ont fait de façon stupide peut-être ?
Ta définition de l'"intelligence" ici ne regarde que toi. Il est évident que le droit d'auteur est beaucoup trop répressif pour un certain nombre d'usages compositionnels totalement légitimes.
AntoineP

Messages : 1038

Lun 19 Déc, 2005 14:33

Quel potentiel de modification pour une chanson sans avoir les sources (les pistes) : très faible


Alors ca c'est pas vrai, mais pas vrai du tout. Il suffit d'ouvrir ses oreilles et de relever ce qu'on entend.
J'aime bien l'analogie entre logiciels et oeuvre musicale. Ca donne de bonnes idées de création et propose une alternative à ceux qui souhaitent s'investir dans la création collective (même si je n'y crois plus depuis longtemps). Mais cela reste une analogie. Pour la musique, le code source d'un logiiciel n'a pas d'équivalent.

Notez de plus qu'en France, vous êtes obligés de citer un artiste si vous utilisez son oeuvre. Je peux donc comprendre que certains artistes préfèrent qu'on leur demande l'autorisation en cas de modification ou d'utilisation de leur travail dans une oeuvre dérivée.

Donc: vive les licences CC
skaal

Messages : 15

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