Je voulais juste parler de la crédibilité de la rigueur scientifique, ou même la primauté de l'intérêt du patient sur tout autre considération moins bas placée sur l'échelle du matérialisme.
J'ai lu avec grand intérêt, et une énorme surprise, un des articles du numéro 395 de La recherche, de mars 2006.
L'article parle du dépistage généralisé du cancer du sein et je le conseille à tous, et surtout à toutes.
L'article explique comment l'ambitieuse et coûteuse (ou lucrative, c'est selon) politique de dépistage systématique du cancer du sein a été décidée sur la base d'une étude d'un scientifique qui montait qu'un dépistage systématique (une mammographie tous deux ans pour les femmes de 50 à 76 ans) réduisait de 25% à 30% la mortalité par cancer du sein (du fait du traitement précoce des tumeurs).
Ça semble logique.
Oui, mais ça ne l'est pas !
- Malgré cette généralisation du dépistage la mortalité a très peu diminué en vingt ans, alors que les techniques de soin se sont améliorées.
- La puce a gratté l'oreille d'autres scientifiques qui ont vérifié la fameuse étude et ont constaté que le fameux scientifique avait faussé les fameux résultats qui, sinon, auraient prévu la banale réalité du résultat nul du dépistage généralisé.
- Quantité de femmes ont été soignées pour des tumeurs bénignes, qui n'auraient pas dégénéré en cancer, alors que les « soins » dégénèrent généralement en ablation (une enquête épidémiologique sur des femmes décédées de tout autres causes montre qu'elles étaient en majorité porteuses de ce type de tumeurs, qui auraient été détectées par le dépistage et auraient donné lieu à « soins », alors qu'elles ont vécu avec ces tumeurs sans difficultés, et sans mutilations).
- Le dépistage se fait maintenant sur des femmes de plus en plus jeunes, jusqu'à 30 ans, alors qu'il est notoire (pour les spécialistes du domaine) que ce dépistage est trop imprécis sur les femmes de moins de 50 ans, donnant trop de « faux positifs », le risque de mutilations inutiles devenant ainsi vraiment énorme.
Bref, la politique de dépistage généralisé du cancer du sein est une machine infernale, née d'une imposture, sans aucun résultat positif, et surtout avec des effets désastreux pour les femmes qui subissent une thérapie lourde (insupportable quand elle en arrive à l'ablation) pour des tumeurs qui ne mettaient pas leur vie en danger.
Il y a aussi le coût financier pour la société, mis ça, ce n'est pas un coût pour tout le monde, pour certains c'est leur fond de commerce. C'est peut-être pour ça que, malgré ces constats, la « machine » continue de tourner et accélère même le mouvement.
Au fait, le même article dit, juste en passant, que le problème est le même pour le dépistage du cancer de la prostate.
Un dossier du numéro de mai 2006 du Monde diplomatique, intitulé « Médicaments cherchent malades » (non mis en ligne, désolé !) explique comment les firmes pharmaceutiques fabriquent des « maladies imaginaires » à grands coups de campagnes médiatiques et « d'avis d'experts » pour se créer de nouveaux marchés aux dépens de bien portants transformés en patients par simple convention.
C'est édifiant !
Bref, tout ça pour dire que la crédibilité des uns et des autres, surtout quand elle est mise en cause par les autres et les uns, dépend au moins autant du rapport des forces entre entre l'étique (personnelle, professionnelle ou scientifique) et les intérêts bassement matérialistes, que de leur assise scientifique, qui peut fort bien être bancale.
-
birin
- Messages : 600
- Géo : Gironde