[align=center]-- Sur le projet de contrôle de l'information sur Internet --[/align]
Mieux faire ressortir les sites de qualité
L’idée d’un label « information en ligne » est assez intéressante à plusieurs titres.
D’abord, elle permettrait effectivement de donner un avantage immatériel aux sites concernés qui pourraient le faire valoir auprès de leurs lecteurs électroniques, ceux-ci pouvant immédiatement identifier les sites où ils seraient à peu près sûrs des informations fournies en ligne. Pour les pouvoirs publics, le label pourrait constituer un outil pour soutenir et promouvoir une information francophone de qualité sur Internet et s’assurer ainsi que le basculement de l’audience vers le
numérique ne se traduit pas nécessairement par un appauvrissement des contenus et un foisonnement d’informations douteuses et non hiérarchisées. Ceci serait particulièrement utile à destination des plus jeunes générations pour leur apprendre, dès leur scolarité, à mettre en perspective ce qu’ils trouvent sur Internet et hiérarchiser entre les différentes sources d’information en fonction de leur qualité.
Des expériences limitées de labellisation à l’étranger
A l’étranger, il existe quelques tentatives de labellisation des sites d’information mais il s’agit généralement d’initiatives assez limitées dans leur portée et généralement lancées par les professionnels eux-mêmes (...)
Car c’est toute l’ambiguïté de la démarche de labellisation qui suscite de nombreuses réserves chez beaucoup d’acteurs (...)
Un risque réel d’inefficacité d’un label sur Internet
Sans compter que la réaction des internautes, difficile à anticiper, pourrait bien être négative face à un label officiel, géré par les pouvoirs publics et les organisations professionnelles, et qui apparaître comme une tentative de contrôle ou d’encadrement d’un réseau dont les aspirations libertaires sont très fortes. Il faut éviter à tout prix que cette démarche ne soit ressentie comme la mise en place d’un label « Presse française d’origine contrôlée », pour reprendre l’expression du SNJ, qui constitue un moyen de protection d’un « vieux » média face au succès du numérique. Le label doit être une véritable aide et un signe de confiance pour les internautes dans leurs relations avec les sites d’information, et non pas une ligne Maginot destinée à préserver, sans aucune chance de succès, les groupes de presse de la concurrence sur Internet.
(...) label, qui pourrait également servir de référence dans différents mécanismes publics relatifs à l’information en ligne et notamment les aides (aide en fonds propres, TVA réduite, statut de correspondant en ligne…) qui sont proposées dans ce rapport.
La presse au défi du numérique, par Marc Tessier (rapport au Ministre du Culture et de la Communication en février 2007)
Monsieur Marc Tessier explique tous les avantages qu'aurait un "label qualité" décerné par les pouvoirs publics et les organisations professionnelles aux seuls sites d'information sérieux (comprendre : sites
professionnels jugés "de qualité"), tout en constatant que cette expérience serait assez inédite dans le Monde et aurait probablement une efficacité toute relative auprès des internautes (ceci expliquant sans doute en partie cela)...
Selon Monsieur Tessier, un label officiel décerné par les pouvoirs publics et les organisations professionnelles serait profitable aux lecteurs électroniques qui pourraient ainsi "immédiatement identifier les sites où ils seraient à peu près sûrs des informations fournies en ligne".
Monsieur Tessier n'ose pas écrire "absolument sûrs", sans doute à cause de fausses informations comme celles qui sont diffusées sur le service public de France Television, qui regroupe pourtant de nombreux journalistes professionnels sous la tutelle de l'Etat et qu'on n'imaginerait pas ne pas recevoir le précieux label (voir
l'affaire Mazerolle sur France 2 par exemple).
La cause est entendue : il faut lutter contre l' "appauvrissement des contenus". Lorsque l'on voit le maigre traitement informationnel qui a été (volontairement ?) fait par les journalistes français de la gestation peu démocratique de la contestée loi du 1er août 2006
relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, dite DADVSI (lire l'article du Herald Tribune : "
In Paris, 'iPod law' unleashes lobbyists" qui traite des pressions déraisonnables exercées par l'industrie du divertissement... cet article est, faut-il s'en étonner, sans équivalent dans la presse française), ou de la disposition de la loi du 5 mars 2007
relative à la prévention de la délinquance qui censure le journalisme citoyen en réservant la possibilté de filmer/diffuser des actes violents aux seuls journalistes professionnels (lire le communiqué de la ligue Odebi : "
Loi Sarkozy : Le monde entier en parle, jusqu’en Iran, et sauf en France…"), il n'est pas certain que le journalisme professionnel labelisé soit le garant de contenus objectifs, riches et pluralistes.
Mais c'est surtout la dimension pédagogique à destination de nos enfants qui rend ce label officiel intéressant pour Monsieur Tessier : "Ceci serait particulièrement utile à destination des plus jeunes générations pour leur apprendre, dès leur scolarité, à mettre en perspective ce qu’ils trouvent sur Internet et hiérarchiser entre les différentes sources d’information en fonction de leur qualité".
Comme le fait remarquer
la ligue Odebi : "les parents apprécieront certainement que l’on enseigne à leurs enfants qu’une bonne information est une information labellisée -entre autre- par différents ministères, comme le ministère de la communication et le ministère de l’intérieur".
Voilà qui nous rappelle les heures les plus sombres de notre passé (voire de notre présent, Monsieur Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture et de la Communication, n'hésitant à user de pressions pour infléchir les lignes éditoriales des journalistes :
exemple 1,
exemple 2).
La Ligue dénonce donc logiquement ce projet "qui n’a tout simplement pas lieu d’être dans une démocratie", et d'ajouter (je cite la ligue Odebi
in extenso) :
Le cynisme du rapport Tessier culmine dans le dernier paragraphe du rapport : “un label, qui pourrait également servir de référence dans différents mécanismes publics relatifs à l’information en ligne et notamment les aides (aide en fonds propres, TVA réduite, statut de correspondant en ligne…)”
Il s’agit ni plus ni moins que d’acheter le contrôle de l’information sur le net.
Croyant sans doute rédiger une note interne, Marc Tessier prodigue par ailleurs d’excellents conseils au ministre de la communication :
“Sans compter que la réaction des internautes, difficile à anticiper, pourrait bien être négative face à un label officiel, géré par les pouvoirs publics et les organisations professionnelles, et qui apparaître (sic) comme une tentative de contrôle ou d’encadrement d’un réseau dont les aspirations libertaires sont très fortes. Il faut éviter à tout prix que cette démarche ne soit ressentie comme la mise en place d’un label « Presse française d’origine contrôlée »”
Marc Tessier est donc un grand démocrate, les internautes étant, eux, bien évidemment, de dangereux “libertaires”.
Lire les discussions sur Framagora :
Le projet de censure du Net de RDDV
Reporters Sans Frontières critique la loi Sarkozy