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Démocratie et décisions rapides et complexes

Le Libre soulève de nombreuses questions, notamment sur la vente liée, les verrous numériques, les libertés numériques.., Parlons-en avec écoute et respect de l'autre.

Sam 04 Fév, 2006 09:29

Je viens de lire un petit article qui n'a rien à voir avec les logiciels libres et les débats DADVSI, et pourtant certains éléments me semblent intéressants dans ce contexe...

par Jean-Marc Bellot (Courbevoie) sur Agoravox
lien: http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=6621

La démocratie : meilleur système pour les décisions rapides et complexes
Une décision rapide doit être prise sur un sujet complexe. D’un côté, une foule d’ignares; de l’autre, un expert de la question. A qui se fier? Si l’instinct peut conduite à privilégier l’expert, les études montrent que la foule bat régulièrement l’expert.

La formule de Sir Winston Churchill selon laquelle «la démocratie est le pire des régimes à l’exception de tous les autres» est sans conteste l’une des plus belles défenses et illustrations de cette forme de gouvernement.

Moins connue cette fois, cette autre formule du très aristocratique premier ministre britannique:

«Rien de tel qu’une conversation de cinq minutes avec un électeur moyen pour disposer d’un argument en béton contre la démocratie¹.»

On retrouve là, sous-jacent, l’antienne des tenants de l’élitisme, selon laquelle l’avis de quelques esprits éclairés vaudrait mieux que celui d’une masse d’individus ignorants. Voire, dans des domaines complexes où l’exercice de prise de décision est délicat, il serait, toujours selon ces personnes, plus sage de faire appel à l’avis des seuls experts.

Alors, à qui se fier? Au Churchill qui déclare que «l’opinion publique doit en toutes circonstances guider et contrôler l’action des ministres, qui sont ses serviteurs et non ses maîtres», ou à Sir Winston qui dénigre l’électeur moyen?

Un petit livre étonnant apporte une réponse inattendue à cette question. Il s’agit de The Wisdom of Crowds, de James Surowiecki, toujours non traduit en français à ce jour. La réponse, c’est qu’en matière de prise de décision sur un problème complexe, une foule d’individus sans connaissance particulière obtient de meilleurs résultats que n’importe quel expert du sujet considéré.

Ainsi, lorsque, au matin du 28 janvier 1986, le monde apprend que la navette Challenger a explosé en vol, les marchés financiers sanctionnent immédiatement le cours des sociétés associées au programme de la NASA. Vingt-et-une minutes seulement après l’explosion de Challenger, les cours de Rockwell, Lockheed, Martin Marietta et Morton Thiokol perdaient chacun entre 3 et 6 points. Pourtant, en fin de journée, alors que les cours de Rockwell, Lockheed et Martin Marietta s’étaient stabilisés, les actions Morton Thiokol avaient continué de chuter et perdaient 12 points par rapport à la séance de la veille. A travers cette différence de traitement, la foule des opérateurs désignait explicitement son coupable. Et elle ne s’était pas trompée. Six mois plus tard, le rapport d’experts, mobilisés sur l’identification des causes de l’explosion, révélait la responsabilité de Morton Thiokol dans la fourniture de joints trop peu résistants au froid. Comment avaient-ils fait? Michael T. Malhoney et J. Harold Mulherin, deux professeurs de finance, se sont penchés sur la question. Qu’ont-ils découvert? Rien, ou du moins rien qui expliquât cette différence de traitement des marchés. Devant ce constat d’impuissance, Malhoney et Mulherin se contentèrent de citer Maureen O’Hara, économiste à Cornell: «Si les marchés financiers montrent qu’ils marchent bien en pratique, nous ne sommes pas certains de connaître la façon dont ils fonctionnent d’un point de vue théorique». Vive l’empirisme, et tant pis pour Monsieur Descartes!

Pourtant, juste après l’accident de Challenger, les marchés avaient dû répondre au plus vite à la question suivante: «Comment la survenance de cette catastrophe doit-elle impacter la valeur des sociétés impliquées dans le programme Challenger?» Il leur avait fallu à peine plus d’unedemi-heure pour y apporter la réponse - et la bonne, qui plus est.

En analysant différents cas, tous plus passionnants les uns que les autres, James Surowiecki met en évidence un ensemble de quatre conditions caractérisant les situations où la foule informe et anonyme bat à plate couture les experts désignés. C’est lorsque:

* La diversité d’opinions est garantie: chaque personne appartenant au groupe est en mesure de faire valoir sa propre interprétation de la situation, si excentrique soit-elle
* Les parties sont indépendantes deux à deux, à savoir que l’opinion des individus est libre et non influencée par des tiers
* Les opinions sont décentralisées et traduisent ainsi une perception locale
* Il existe un mécanisme communément accepté d’agrégation à travers lequel les opinions locales se consolident pour donner forme à l’expression d’une décision collective.

Diversité et indépendance de pensée, expression des points de vue au niveau local et principe de prise de décision par agrégation des votes locaux, voilà quelques règles d’or qui vont comme un gant à notre bonne vieille démocratie. Est-ce à dire que les décisions émanant du jugement collectif sont toujours avisées? Pas forcément, affirme l’auteur. En revanche, ce qui reste toujours sage, conclut-il, c’est la décision de les prendre de façon démocratique.
frenchy

Messages : 529

Sam 04 Fév, 2006 11:01

Nous assistons malheureusement à une dérive technocratique de nos institutions. Ce phénomène me semble amplifié par la mondialisation et le fonctionnement de l'union européenne. Le comble de la Technocratie a été l'adoption de la constitution européenne sans consultation citoyenne dans de nombreux pays, comme en Italie...

La technocratie
...Alors que le renforcement de l'Etat depuis le début du XIX e siècle avait contribué à accroître le rôle du gouvernement et de l'administration, le pouvoir technocratique, dans les Etats de la fin du XXe siècle, a tendance à se substituer aux élus. Les experts détiennent une place toujours plus grande dans le processus de décision et développent un réseau de relations avec les groupes pour dégager des compromis. La négociation contractuelle risque ainsi de remplacer systématiquement la délibération, traditionnellement appelée à réguler les intérêts conflictuels...


Malheureusement, nos élus privilégient l'avis d'experts au sentiment général. :( Mais la conscience humaine, née de la réciprocité, est d'abord l'expression d'une liberté souveraine! ;-) Et sous peine d'être reprise par le contexte de l'un ou de l'autre, elle doit impérativement inventer un mode d'expression qui lui soit non seulement propre mais qui soumette la nature à sa loi. Internet devient de plus en plus son jardin de prédilection. :) :) :) Nos élus devraient l'entretenir au lieu de le saboter :(
*genium*

Messages : 382

Sam 04 Fév, 2006 14:03

*genium* a écrit:Nous assistons malheureusement à une dérive technocratique de nos institutions. Ce phénomène me semble amplifié par la mondialisation et le fonctionnement de l'union européenne. Le comble de la Technocratie a été l'adoption de la constitution européenne sans consultation citoyenne dans de nombreux pays, comme en Italie...


A propos de l'Europe :
Dans un article du Monde d'il y a quelques jours, on pouvait apprendre qu'il y a Bruxelles 17000
lobbyistes. A70 %, ils travaillent pour des entreprises privees, le reste, c'est les ONG, les syndicats,
les representants de collectivites locales, ....
Le nombre de fonctionnaires travaillant pour la commission est le l'ordre de 24000, et il y a
40000 fonctionnaires europeens au total.

Et apres ca, on vient nous proner l'etat minimal ! Belle hypocrisie lorsque pour 2 fonctionnaires
de la commission il y a 1 personne qui vient leur expliquer quelle loi il faudrait passer pour
la satisfaction d'interets prives.
Dernière édition par akabob le Dim 05 Fév, 2006 00:32, édité 1 fois au total.
akabob

Messages : 63

Sam 04 Fév, 2006 20:14

Je suis pro-européen, et donc d'autant plus attristé par les processus peu démocratiques de nos institutions européennes. Les directives sont souvent le fruit d'une politique technocrate en se faisant ainsi le relais des lobbies en tout genre. Le projet de loi DADVSI fut pour moi l'occasion d'une prise de conscience brutale; tous les secteurs sont touchés. :( Le Foot, par exemple! Notre ministre de la jeunesse et des sports vient d'accepter cette semaine l'entrée en bourse des clubs de foot pro! Pourtant, il s'était très fermement opposé, dès sa prise de fonction, à cette mesure néfaste et contraire à ses convictions et à la tradition sportive française! Il semblait rester fidèle à des convictions profondes, aux valeurs du sport, aux vertus de l'olympisme... Il faisait vraiment honneur à son passé de champion! MaisJean-François Lamour vient de changer d'avis! :( Les menaces de l'Europe, la pression des Lobbies (le G14 est un lobby rassemblant les 18 clubs européens les plus riches; il s'agit d'un groupe en marge des associations officielles qui gèrent le Football au niveau mondial, européenet français--) ont eu raison de la politique française. Une nouvelle fois. Il nous promet maintenant de nous protéger des effets néfastes de cette entrée en bourse en encadrant ces mesures de diverses protections...

Mon propos n'est pas de juger la pertinence de l'entrée des clubs de Foot sur les marchés financiers, bien que cela risque d'entraîner la création de "ligues fermées" aux clubs inférieurs, et la mort progressive des équipes nationales. Le foot est une de mes passions, et j'aimais les valeurs de cette équipe deFrance multicolore et multiracialechampionne du monde en 1998... Les valeurs sportives se rapprochent des valeurs culturelles. Je tenais à illustrer différemment les processus contestables de notre société; nos institutions semblent bel et bien gangrénées par l'avidité de lobbies en tout genre. Leur influence néfaste sur nos élus dicte de plus en plus leur politique :(

Et comme l'a écrit Thierry Gaudin, ce projet de loi DADVSI "est un test, et permettra de savoir si la France, qui fut autrefois rédactrice des droits de l'homme, est maintenant devenue, comme bien d'autres pays, une république bananière gouvernée par des lobbies inutiles."
*genium*

Messages : 382

Dim 05 Fév, 2006 19:09

Il y a du grain à moudre sur ces idées...je pense que nous sommes face à une nouvelle prise de conscience du onctionnement de l'état (en général)...

Nous sommes en train de revenir en arrière sur l'apriori "il faut se regrouper pour être forts" ou "l'union fait la force"
Quand je dis que nous sommes en train de revenir en arrière, je ne veux pas dire dans les faits, mais nous constatons que cette apriori nous mene dans l'impasse!

Prennons un exemple le syndicat (on peut en faire plein d'autres comme l'UE par exemple):
Je suis dans mon entreprise, et j'ai l'impression que mes droits son bafoué, si je vai voir mon patron en lui disant de modifier sa conduite, je vai etre sanctionné professionnellement. Alors je me syndique, pour avoir du poids...Mon patron ne pourra pas virer tous les syndiqués de l'entreprise...Mais voilà on est pas assez nombreux dans l'entreprise et notre action est locale donc corporatiste....je monte donc un syndicat départemental puis nationnal pour que tout le monde s'alligne et donc que les avancées soient intéressantes pour tout le monde et appliquées à tout le monde. jusque là tout va bien pour les salariés de mon entreprise....Seulement ca ne dure qu'un temps car plus le temps passe plus les combats passés perdent du sens dans tel ou tel secteur d'activité puis le syndicat est tellement grand que les choix se font par consensus, et que nous ne satisfaisons que la majorité voir meme personne pour ne pas nuir à une minorité....en gros au bout d'un moment on est tellement grand qu'on ne peut plus bouger. Par contre on a une énorme capacité de réflexion et d'analyse au service des salariés, mais les contraintes de tous ces salariés sont trop diverses pour répondre a toutes en une fois! Les salariés partent donc du syndicat et vont défendre leur pomme chacun chez eux avec des résultats forcément décevants car ils n'ont plus de pouvoir.

Là où il y a dérive dans l'histoire, c'est que tout les syndiqués sont au service du syndicat, ou que le syndicat est au service des syndiqués...ca parrait bien vu que ca peut aller dans les 2 sens mais le hic c'est que le syndicat ne peut pas se mettre au service des syndiqués pour ce que j'ai expliqué plus haut. En revanche les syndiqués pourraient être au service des syndiqués!! Autrement dit les initiatives locales restent possibles, la vision d'ensemble aussi, la force du nombre aussi, mais l'appareil politique ne doit pas satisfaire tout le monde à chaque instant et dans chaque décision! En gros les associations de personnes sont bénéfiques tant qu'elle n'ont pas dépassé une certaine taille ensuite elles doivent communiquer entre elles plutot que de s'associer!

Un tel raisonnement au niveau de l'UE est particulièrement démonstratif...mais pour les syndicats nous avons l'avantage de pouvoir voir aujourd'hui les dégats d'une telle centralisation.
Redj

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