on va commencer par évacuer l'accessoire :
- définition du libre au sens de la FSF = ok
- efforts sur la gratuité et la diffusion qui ne suffisent pas à qualifier de 'libre' = ok
- réactions violentes, désir de reconnaissance, dû, marque de fabrique, etc : à dégager, non pertinent (ou plutôt anecdotique)
à partir de là, j'y vais sur des oeufs et passe en mode [perso] :
C'est un outil conceptuel, une notion formalisée pour désigner sans ambiguïté une façon de partager les oeuvres (pas seulement "le savoir") où tout le monde joue à égalité. Ce sont les "quatre libertés", qui autorisent tous les usages raisonnables (on pourrait dire "moraux") d'une oeuvre à tous - qu'ils soient "utilisateurs" ou "co-créateurs".
C'est de plus une notion qui marche, concrètement, au-delà de toute espérance, et qui donc est l'expression d'un équilibre bien trouvé.
= ok
je crois que c'est l'essentiel de la révolution industrielle qui se dessine en informatique : bon concept, bons résultats, un idéal solide à préserver et à atteindre.
Il n'y a aucun problème à dire qu'on fait du "semi-libre" ou du "non-libre". J'ai plus de respect pour les gens qui admettent sans honte qu'ils n'ont pas envie de s'associer entièrement au libre,
= ok aussi.
le libre est un concept exigeant qui demande un réel courage : accepter que son oeuvre soit reprise par tout le monde (= éventuellement par n'importe qui), accepter de perdre le contrôle d'une oeuvre dans laquelle on s'est profondément investi. je trouve que c'est un acte de foi, et je suis très admiratif de ces choix. On pourrait parler d'humanisme, de radicalité, etc. La barre est placée très haut par rapport à nos petits réflexes conditionnés.
En revanche cette exigence n'est pas à la portée de tous :
- soit par ignorance -->approche pédagogique à dégainer, expliquer et convaincre comme tu l'as fait pour moi, merci,
- soit par choix : p.ex certains auteurs de tutoriels framasoft, qui comprennent les enjeux, mais qui ne souhaitent pas lâcher ce contrôle. la question n'est pas de savoir s'ils ont tort ou raison, mais de respecter ce choix dès lors qu'il est lucide, et il l'est souvent
C'est la première raison pour laquelle il faut reconnaître cette proximité de valeurs (proximité, pas identité) avec le libre. Les auteurs qui souhaitent se placer sur un terrain coopératif (= gratuité + diffusion) ont plus de valeurs communes avec le libre qu'avec le propriétaire. Plus précisément, la seule différence est dans le critère d'ouverture : totale pour le libre (sous quelques réserves cependant ...), partielle pour le coopératif.
La deuxième raison pour laquelle il faut reconnaître cette proximité est plus politique, on se situe là au niveau de la masse critique et de la logique de marché : créer un front commun dans un rapport de forces.
(je force le trait) : Le libre seul aura du mal à impacter le rapport de force avec le propriétaire. Un front uni libre + coopératif permettra de transformer plus facilement cet idéal en réalité quotidienne pour l'utilisateur de base, pour le citoyen.
Pourquoi ? parce que le coopératif concerne le grand public, les gens ordinaires, ceux qui ne font pas le choix du libre mais qui subissent/rejettent la dépendance du propriétaire, ou qui tout simplement se situent dans une alternative morale et sociale (il n'y a pas de jugement de valeur dans 'grand public', 'gens ordinaires', 'utilisateurs/citoyens de base', de même qu'il n'y en aurait pas si j'osais utiliser les mots 'élite', mais ça fait un peu lyrique)
Autrement dit, le libre crée la dynamique, le coopératif donne au mouvement une force d'inertie qui permettre de faire bouger efficacement les choses, plus près du coeur du système et plus seulement à la marge.
Pas convaincu par l'argument de la masse critique ? rappelle moi l'une des raisons pour lesquelles le libre a fonctionné 'au delà de toute espérance' : internet, qui permet à une masse de programmeurs de bosser ensemble. Sans cette masse, qu'en serait-il aujourd'hui des LL ? La question des migrations massives (administrations, sociétés, particuliers) se poserait-elle dans les mm termes ?
Enfin, d'un point de vue tactique, il est dans l'intérêt du libre d'intégrer les nouveaux entrant, car de toute manière, ils vont rentrer et se servir, et les tenants de l'orthodoxie du libre (sans jugement de valeur ni sarcasme) vont se retrouver débordés sous la masse, incapables de garde la position qu'ils ont actuellement. Si ce jour arrive, les mots 'aigreur, réactions violentes, manque de reconnaissance, frustration et dépit' prendront une autre saveur, ou plutôt une autre amertume car on sera tous perdants.
C'est la troisième raison pour laquelle il faut un mot adapté : l'intérêt de tous.
Pour conclure, je reprend ta métaphore sur la démocratie : il faut aménager les critères de la démocratie pour prendre en compte la démocratie directe, la démocratie participative, la démocratie parlementaire, etc. Tu connais la démocratie directe (= le libre), qui est un idéal atteignable dans certaines conditions (notamment démographiques). Lorsque cet idéal ne peut plus être atteint, on le complète par la démocratie participative (= le coopératif dans cette métaphore). La démocratie participative n'est pas la dictature, la réalité n'est pas bipolaire dans les détails, et c'est au niveau des détails qu'on se situe là.
C'est la quatrième raison pour laquelle il faut un mot : la réalité théorique ('tain la pirouette, fallait l'oser celle là !)
;)
LS.
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LS.
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