Le 22 avril, suite à une décision de Nicolas Sarkozy prise en 2003 quand il était ministre de l'intérieur, des ordinateurs de vote seront utilisés pour la première fois dans une élection présidentielle.
Cette semaine, le Canard Enchainé signalait que, le 22 avril, 1.4 millions de suffrages seraient ainsi exprimés dans 1600 bureaux de vote au travers d'ordinateurs de vote. Pour donner un ordre d'idée, le Canard rappelait que le candidat du PS a été éliminé par le candidat du Front National en 2002 par 194 000 voix.
Des chercheurs en informatique dénoncent depuis longtemps les faiblesses du vote électronique (voir le blog de David Monniaux ou celui de Roberto Di Cosmo ou le rapport de François Pellegrini ou celui de Bernard Lang ou encore ce reportage de itélé où l'on voit un chercheur hollandais démontrer concrètement la faiblesse de des ordinateurs de vote]).
Sur le plan politique, François Bayrou s'est exprimé dans politis du 8 mars : "Il faut refuser cette évolution et suspendre toute utilisation»". Le PS a lui demandé il y a quelques jours un moratoire rejoignant là le PCF et les Verts. Le Monde a consacré un article à la conclusion quelque peu bancale présentant la position du ministère de l'intérieur.
La polémique enfle. Ca sent le recours juridique. Le Conseil Constitutionnel a subito estimé (bonjour M. Debré qu'il se devait d'intervenir.
Sur ce, Gilles J. Guglielmi (notamment professeur agrégé de droit public à assas) s'est fendu d'un billet ou il rappelle que le communiqué du conseil n'a aucune valeur juridique et que laisser croire, comme le fait le conseil constitutionnel, que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes juridiques possibles pourrait bien être qualifié par certains de tentative de désinformation par usage d’un argument d’autorité.
Au feu les pompiers (constitutionnels) ! - A propos du vote électronique
jeudi 29 mars 2007, par Gilles J. Guglielmi
Où la température des puces des "machines à voter" commence à réchauffer le macrocosme.
Le Conseil constitutionnel a cru bon de publier un communiqué laconique le 29 mars 2007 rappelant tout d’abord que "l’utilisation des machines à voter pour les élections, notamment présidentielles, est autorisée par le législateur depuis 1969", ce qui est un fait historique ; et ensuite que "Ce recours aux machines à voter dans les conditions fixées par l’article L. 57-1 du Code électoral a été déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel", ce qui est au mieux une approximation, au pire une tentative de couper court à un soupçon grandissant sur la transparence et la sincérité des votes qui seront émis en 2007.
(...)
La suite : http://www.guglielmi.fr/spip.php?article71
Edit (4 avril) : Benoît Sibaud, chercheur en informatique et par ailleurs président de l'APRIL a publié [url=http://oumph.free.fr/textes/vote_electronique/formation_vote_electronique.html[/url]un éloquent compte-rendu[/url] de la formation sur les machines à voter qu'il a reçu en tant que citoyen ayant demandé à être président-suppléant et assesseur sur un bureau de vote à Issy-les-Moulineaux. . On y lit notamment :
Sur la fiabilité technique : 1 ordinateur sur 10 qui ne s'initialise pas au premier coup, (au moins) 1 boîtier de contrôle qui ne fonctionne pas pendant une partie du temps, des P.V. imprimés qui varient suivant les machines (caractères affichés correctement ou non). Si les mêmes proportions sont déclinées sur 58 machines dans 40 bureaux, en conditions réelles avec les électeurs, les assesseurs et les présidents auront besoin de calme (aux bips des machines près), patience et sérénité comme disait le formateur... Et les électeurs aussi.
Sur les aspects logiciels : un logiciel mal traduit (messages qui débordent, phrase alambiquée parlant de « résumé » pour « to resume »), mal régionalisé (problème d'impression des caractères accentués) et donc mal testé... Des comportements qui varient suivant les ordinateurs.
Sur l'ergonomie : la confusion entre les boutons ellipse verte et losange vert, la motion « Insérez BIP » avec une grande flèche quand il ne faut pas insérer le BIP, l'écran tactile pour un vote en braille, etc., me laissent dubitatif sur l'ergonomie globale.
Sur le contrôle : pas de contrôle possible, fonctionnement en boîte noire côté matériel et logiciel, journal non contrôlé par le bureau, P.V. ne mentionnant pas les bulletins supprimés, la fonction de recomptage est totalement illusoire, etc. Pas de contrôle pour le citoyen, pas de contrôle pour le président ou les assesseurs (qui ont malgré tout les P.V. à signer).
Entre les soucis techniques, la complexité des opérations et le temps pris par les différentes opérations, beaucoup de participants m'ont semblé inquiets pour le déroulement des élections. Il est clair que le vote électronique par ESS iVotronic n'est pas plus simple pour les membres du bureau de vote.
Gilles J. Gugliemi, le professeur agrégé de droit public auteur du billet déjà cité (Au feu les pompiers (constitutionnels !) a été repris par lemonde.fr. Il a également signalé sur son blog à un lecteur qui souhaitait exprimer son opposition au vote électronique qu'«un mouvement citoyen de grande ampleur pourrait être lancé au moment du vote. Tous les électeurs qui sont obligés à utiliser les ordinateurs de vote dans leur bureau peuvent saisir le président du bureau de vote d’une réclamation. Il en est de même des électeurs qui voteront de manière classique s’ils estiment que leur voix ne doit pas être mélangée, dans les comptages ultérieurs, avec des voix obtenues par un autre procédé, électronique et vulnérable. Ces réclamations sont la première étape d’un recours devant le juge électoral. Si elles sont nombreuses, elles prouveront ipso facto le doute qui pèse sur l’exactitude des opérations électorales. Ce doute disqualifie l’expression de la volonté démocratique.
Le site beta-politique a lui publié un mode d’emploi pour porter plainte contre les machines à voter avant le vote et mode d’emploi pour protester contre les machines à voter le jour du scrutin
Nb:Le site recul-democratique.org liste les villes concernées
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cespern
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