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loi DADVSI => délit d’incitation au vol par l'état

Le Libre soulève de nombreuses questions, notamment sur la vente liée, les verrous numériques, les libertés numériques.., Parlons-en avec écoute et respect de l'autre.

Mar 06 Déc, 2005 12:41

Le professeur Hugenholtz de l'Université d'Amsterdam, avait déjà écrit en 2000, que la "Copyright Directive" du 25/11/00 de l'Union Européenne était probablement dénuée de bases légales, et donc illégale. En effet, cette directive a été prise sur la base du Traité d'Union Européenne alors que l'article 230 de ce traité précise que l'objet de celui-ci est uniquement "de faciliter le mouvement des biens et la liberté des services". Ainsi aucune directive de la Commission Européenne dont l'objet serait sensiblement différent de ceux-ci ne peut valablement être fondé sur ce traité. Sur ce point, il existe en particulier une jurisprudence apparemment établie (affaire C-376/98 du 05/09/00 Allemagne c. Parlement Européen...)

voir: http://www.ivir.nl/publications/hugenholtz/opinion-EIPR.html



Concernant le projet de loi DADVSI, je suis choqué de la logique suivie par le législateur pour changer la loi dans le sens voulu par certains éditeurs, alors qu’un cadre législatif ancien, considéré jusqu’à présent comme satisfaisant existe aujourd'hui pour protéger complètement leurs droits.
Bien plus, on doit constater que ces éditeurs ont librement pris la décision de ne pas utiliser ce cadre législatif, parce qu’ils considèrent comme commercialement avantageux pour eux de faciliter la lecture de leurs ouvrage avec des équipements génériques et d’en rendre possible la copie.
Ainsi, on a toutes les raisons de croire que le projet de loi DADVSI n’a pas réellement pour but d’empêcher la lecture d’ouvrages électroniques avec des équipements non formellement autorisés à cette fin par les éditeurs, mais a pour but réel de placer délibérément dans l’illégalité une grande partie des acheteurs de ces ouvrages, cette illégalité réputée étant alors considérée par ces éditeurs comme un moyen pour eux d’améliorer leur « position marketing » dans le cadre des relations client fournisseur, et donc d’augmenter leurs marges.
Il y a ici une dérive très inquiétante, où le droit ne sert plus à préciser ce qui est licite et ce qui ne l’est pas, mais est au contraire instrumentalisé dans une logique qui est en fait une logique marketing, et ceci en projetant délibérément dans l’illégalité de très nombreux utilisateurs, dont une grande partie ne sont clairement pas en position de comprendre et de maîtriser les techniques qu’ils utilisent ainsi que les implications administrative de ces techniques.
Il y a donc apparemment ici délit d’incitation délibérée au vol, de la part de ces éditeurs et de la part des élus qui se montrent si empressés à défendre ainsi leurs intérêts commerciaux.





Je reprends ici cet argument de façon un peu plus développée :


1) Protections satisfaisantes offertes par le cadre législatif actuel

Le cadre légal actuel permet très facilement de réaliser des médias et des matériels de lecture permettant la vérification très complète des droits de l’utilisateur par rapport à l’ouvrage et protégeant totalement les intérêts des éditeurs, sans qu'il soit en rien nécessaire de modifier la loi.
En effet, il est très facile à un industriel d'inventer un nouveau type de média numérique, de protéger complètement les droits intellectuels au média lui-même et aux matériels de lecture correspondants, et de passer des accords contractuels avec les entreprises d'éditions et/ou partenaires industriels qu'il souhaite afin d'utiliser ce nouveau média exclusivement dans un cadre contractuel qui leur agrée. Ce cadre pouvant très facilement interdire la commercialisation de matériels de copie individuels et/ou limiter l'accès des lecteurs à certains ouvrages de ce type. La protection est alors complètement acquise grâce à la protection des droits industriels liés au nouveau média et grâce au cadre contractuel existant entre le détenteur de ces droits et les éditeurs utilisant le média.


2) Volonté des éditeurs de ne pas utiliser ces protections pour des raisons commerciales librement acceptées par eux

Depuis une vingtaine d'années environs, on assiste à l'éclosion d'un certain nombre de médias dit "standards" (par ex. mini-cassettes, cassettes VHS, CD, DVD....), dont les concepteurs ont décidé d'abandonner, ou de céder à des conditions très généreuses, leurs droits industriels. Ceci a permis l'éclosion d'industries importantes, à la foi en ce qui concerne la fabrication de ces médias, celle des matériels de lecture ou d'écriture correspondants et l'édition d'ouvrages utilisant ces médias.

Les éditeurs qui ont fait le libre choix d'utiliser ces médias standards l'ont fait parce qu'ils souhaitaient bénéficier d'un effet de masse, considérant que leurs prospects disposaient vraisemblablement déjà d'équipements de lecture approprié, du fait même de l'ouverture et de l'universalité du média en question. A l'inverse, l'utilisation éventuelle de médias et d'équipement de lecture "non standards" pouvait pénaliser commercialement ces éditeurs dans la mesure où ils étaient fondés à craindre que leurs prospects ne souhaiteraient pas acquérir ces équipements particuliers pour lire leurs ouvrages, et donc n'achèteraient probablement pas ces ouvrages.



3) De l’incitation délibérée au vol considérée comme une technique marketing comme une autre

Aujourd'hui on est donc devant le cas ou ces éditeurs demandent au législateur de considérer comme un délit la lecture d'un ouvrage écrit sur un média numérique standard, en utilisant un dispositif de lecture standard (par exemple un PC utilisant un Freeware non formellement agréé par l'éditeur....), et ceci, alors même que les éditeurs qui ont choisi ces médias l'ont fait en totale connaissance de cause, parce qu'ils considéraient comme un avantage commercial pour eux de faire en sorte que leurs clients puissent lire ces ouvrages sans êtres contraints d'acheter des matériels de lecture non standards.



4) Délit apparent de complicité d’incitation au vol par nos élus

Que de méchants éditeurs souhaitent avoir le beurre et l'argent du beurre, et que, après avoir choisi librement le format CD dans l'intention claire et avouée de permettre la lecture de leurs ouvrages sur n'importe quel PC, ils prétendent maintenant faire fabriquer une loi sur mesure pour mettre artificiellement dans l'illégalité la grande majorité de leurs clients, n'a rien de surprenant en soi. Tout le monde a compris que les freeware de lecture de CD continueront a exister sur Internet (ne serait-ce qu'aux US...) et que de très nombreux utilisateurs les installerons sur leurs machines, dans de nombreux cas sans comprendre, ni la manipulation, ni les problèmes qu'elle est réputée poser. De la part des éditeurs, qui peuvent à n'importe quel moment faire le choix de médias non standards protégeant parfaitement leurs droits dans le cadre juridique actuel, il ne s'agit jamais que d'une instrumentalisation du droit dans le seul but de gagner du fric, et ceci quelqu'en soient les conséquences par ailleurs.

Pour l'état et le législateur, il y a quand même un pas qui est en passe d'être franchi : le délit d'incitation au vol ou de complicité d'incitation au vol. En effet, à partir du moment ou il est avéré que des éditeurs font tout ce qui faut pour pousser le maximum de gens à commettre des délits parce que c'est la conclusion à laquelle ils sont arrivée quand à la meilleure manière pour eux de gagner du fric (peut être demains il vendront de la drogue ou ils feront des casses....), on est légitimement en droit de considérer que ces industriels sont eux même coupables d'incitation aux vol sur une assez grande échelle et que l'Etat Français parait bien évidemment complice de ce délit.




5) Etat délictueux ou criminel ?

Il est piquant de noter qu’à l’heure ou le garde des sceaux verse des larmes de crocodile sur l'affaire d'Outreau, le "système Français" semble continuer a montrer un parti pris évident pour les délinquants et autres criminels et contre les citoyens « normaux » dont le seul tort est d’être honnêtes et respectueux des autres.
Le projet de loi DADVSI correspond très bien à cette dérive actuelle de l’état français et permet notamment, pour citer une phrase de Churchill concernant l’ancienne Union Soviétique de faire en sorte que la France devienne le pays où « tout ce qui est permis est interdit…. ».
laurent2

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