bonsoir. juste quelques points, en passant.
1.
desesperatly a écrit:Si l'on reprend la discussion présente dans ce fil, on comprend parfaitement pourquoi les titulaires de droits ont pu dire qu'il faudrait adapter les licences pour que les logiciels communiquants libres puissent coexister avec l'amendement Vivendi. Or, plutôt que d'exposer ces raisons juridiques, le communiqué déclame que la SACEM a signé l'arrêt de mort du logiciel libre... Ce n'est pas sérieux. C'est tout le raisonnement qui est déformé.
mais le communiqué ne dit pas tout à fait ça. il est plus précis, quand même (même s'il résume / synthétise / raccourcit 13 heures de débats qui furent, semble-t-il, rien moins qu'animés et fort durs :
http://www.fsffrance.org/news/article2005-11-25.fr.html a écrit: le SNEP et la SCPP déclarent aux auteurs de Logiciel Libre : « Vous allez changer vos licences. » La SACEM ajoute : « Vous allez arrêter de publier vos logiciels. » Et se déclare prête à « poursuivre les auteurs de logiciels libres continuant de divulguer leur code source » si l'amendement « VU/SACEM/BSA/FT Division Contenus » [1] était voté par les parlementaires.
Car nous en sommes là : publier des Logiciels Libres permettant d'accéder à la culture est en passe de devenir un délit de contrefaçon. France Télécom R&D sera donc poursuivie par la SACEM pour avoir publié Maay et Solipsis (solutions logicielles de P2P permettant l'échange de données) [2] ?
il s'agit des logiciels permettant de diffuser des fichiers numériques : ça fait beaucoup.
alors certes la loi ne veut peut-être pas expressément, dans une lecture a minima, (et ne serait probablement pas lue et appliquée ainsi par les juges), interdire tout logiciel de ce type, libre ou pas d'ailleurs, qui n'intègrerait pas de drm ;
je pense que la question est cependant posée, et doit être posée, au vu des présupposés philosophiques, conceptuels, qui sous-tendent toute l'argumentation et toute la propagande des ayants-droits industriels (RIAA, SNEP, majors, SACEM un peu égarée là dedans) depuis des années sur ce sujet.
2. il est quand même au moins problématique de vouloir utiliser le droit pour limiter ou interdire une technologie (le droit est fait pour réprimer les actes délictueux, et condamner les auteurs de ces actes).
ce délire de la responsabilité "secondaire" (je ne sais pas si c'et le terme juridique exact en français, "secondary liability", cf: Grokster vs. MGM) devient manifeste dès qu'on tranpose : irait-on tenir un fabriquant ou un vendeur de couteaux pour responsable ne serait-ce que de la mise à disposition de l'outil qu'un criminel aura utilisé pour suriner sa victime ? non, n'est-ce pas ?
on peut considérer que l'essence d'un logiciel, de l'informatique, est concernée. cf. le amicus brief de Intel dans l'affaire Grokster vs. MGM, ou Intel s'est senti obligé de rappeler une vérité de base :
"le peer to peer, comme toute « technologie numérique (est), par nature, (une) technologie de copie ; il y aura toujours un risque, pour quelque technologie numérique que ce soit, ses concepteurs eussent-ils les intentions les plus strictement louables, d’être utilisée à des fins d’infraction " cf.
http://www.eff.org/IP/P2P/MGM_v_Grokste ... _intel.pdfau regard de ces fondements du débat, je ne crois pas qu'il n'y ait lieu de se préoccuper.
3. sur cettte phrase précise : "on comprend parfaitement pourquoi les titulaires de droits ont pu dire qu'il faudrait adapter les licences pour que les logiciels communiquants libres puissent coexister avec l'amendement Vivendi. " :
tourné comme cela, on peut comprendre oui...
mais le moyen de "coexister" avec une aberration ? là est l'inacceptable, l'incompréhensible. et, c'est vite vu, on ne peut ni comprendre ni admettre que les titulaires de droits puissent pousser un amendement comme celui-ci ; encore moins que le ministère de la culture puisse sembler en considérer l'éventualité avec bienveillance ne serait-ce que 5 minutes.. alors, 13 heures... !
comme vous le dites parfaitement :
desesperatly a écrit:Sur les amendements, je n'ai pas le temps de développer sans rentrer dans de très longues discussions. Mais là encore, ils me semblent 1) incompatibles avec les engagements internationaux de la France, 2) irréalistes économiquement, 3) mauvais d'un point de vue légistique.
donc leurs motivations que l'on "comprend parfaitement" sont elles aussi "1) incompatibles avec les engagements internationaux de la France, 2) irréalistes économiquement, 3) mauvais d'un point de vue légistique"
il devient moins évident de les comprendre.
4. vous dites dans le message qui ouvre ce fil : "seuls sont donc concernés, parmi les logiciels libres, les applications de p2p" ...
euh... les textes (dadvsi aussi bien qu'amendement vu/sacem), définissant les logiciels (ou applications) concernés (je me n'évoque ici que cet aspect de définition, non tous les autres éléments abordés par les textes que je cite)
pour l'amendement, de "logiciel manifestement destiné à la mise à disposition non autorisée au public d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit littéraire et artistique qui ne comprend pas les mesures pour, en l'état de la technique, préserver ces oeuvres ou objets protégés contre un usage non autorisé", cf.
ici ,
pour la loi, (article 14) de "une application technologique, un dispositif ou un composant ou fournir un service destinés à faciliter ou à permettre la réalisation, en tout ou en partie (alinéa 4) [de] distribuer, importer, mettre à disposition sous quelque forme que ce soit ou communiquer au public, directement ou indirectement, une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme (alinéa 2)" cf.
ici.
à la lecture de ces définitions / délimitations / précisions, ce ne sont pas les seuls logiciels de p2p qui sont concernés, mais tout logiciel ou application ou dispositif ou composant permettant de diffuser un fichier numérique [éventuellement soumis à droits et restrictions : là est l'aspect essentiel, là devrait se focaliser, à celà devrait se circonscrire l'attention du législateur - or l'appareil légal est déjà bien pourvu ; qu'est-il besoin d'y rajouter une couche dont la source, l'eucd, fait débat au sein du monde juridique européen... ?]
or les logiciels de mails, tout bêtement, mais aussi "les lecteurs multimédias ou les logiciels de messagerie instantanée pourraient également être concernés puisqu'ils permettent d'accéder à des fichiers protégés ou de les échanger. Sans parler des web-radios ou de logiciels comme StationRipper ..." comme le remarque notamment
atelier.fr...
5. sur le fond de tout cela, un article assez long de groklaw.net discerne fort bien les problèmes que soulèvent les drm, et les pertes qu'ils vont entraîner, en regard desquelles les alléguées pertes de l'industrie du disque sont ... minables, je ne trouve pas d'autre mot (fort débattues, en plus : une
revue récente des diverses études là-dessus) :
http://www.groklaw.net/article.php?stor ... 2009311159
(je cite un passage, en anglais, désolé)
The problem, if there is one, is distribution, not copying.
If a company limits the number of times I can listen to music, or how I can read a book, is it normal copyright law as we know it that they are enforcing? Is it normal anything? Doesn't the change in what tech now allows mandate a change in the law to make it possible for normal people to act like normal people?
Is it *copying* that should be regulated -- that's all computers do -- or should it be distribution? It's only the latter, so far as I can see, that does them any commercial harm, even if you agree with their premise that file-sharing hurts them. The conversation is about the way the world used to be; but everything has changed.
We've learned that Microsoft and others are designing DRM so that the copyright holder can choose whatever rights they wish. There is no built-in limit for them. For that matter, there is no fair use. What happened to that part of copyright law? Why don't these copyright holders have to abide by that part of the law? They have structured the conversation as piracy, with all the emphasis on their alleged losses. But they are not alone in losing. We are losing too. We are losing a normal cultural life, a normal human life. And we are losing fair use.